FRANCE L'année politique 2019
Élections européennes : un test pour les partis
Les élections européennes du 26 mai se déroulent dans un contexte d’incertitude résultant de la progression des populismes et de la perspective du Brexit. Elles reconduisent le duel entre le parti de Marine Le Pen (arrivé en tête du scrutin) et celui du président, qui se pose en défenseur du projet européen dans sa lettre aux « citoyens d’Europe » (publiée en mars dans un quotidien de chacun des 28 pays membres). Le Rassemblement national confirme sa domination sur les différents groupes populistes ou d’extrême droite : que ce soit sur les dissidents de l’ex-FN regroupés autour de Florian Philippot, allié pour la circonstance avec certains « gilets jaunes », sur l’Union populaire républicaine de François Asselineau, qui prône le « Frexit », ou sur les souverainistes de Debout la France de Nicolas Dupont-Aignan.
Les résultats font d’Europe Écologie-Les Verts (EELV) le premier parti de la gauche française, même si la reproduction de ce bon résultat reste incertaine. Ils confirment les difficultés du parti Les Républicains (LR) et du Parti socialiste (PS), encore mal remis de leur défaite à l’élection présidentielle de 2017. Le PS, incapable de trouver une tête de liste en son sein, se rallie à l’intellectuel Raphaël Glucksmann (Place publique) pour conduire la bataille des élections européennes, tandis que l’ancien candidat officiel du PS Benoît Hamon dirige sa propre liste. L’annonce par ce dernier de son retrait de la vie politique vient d’ailleurs couronner les résultats catastrophiques de sa candidature. Le choix de la tête de liste de LR (le jeune professeur de philosophie François-Xavier Bellamy, lié aux mouvements conservateurs La Manif pour tous et Sens commun) contribue sans doute à ses maigres résultats, que n’améliore pas la multiplication des candidatures (ainsi l’UDI de Jean-Christophe Lagarde a présenté sa propre liste). La France insoumise (LFI) de Jean-Luc Mélenchon, concurrencée sur sa gauche par le Parti communiste (liste conduite par Ian Brossat, aucun élu) et Lutte ouvrière (Nathalie Arthaud, aucun élu), malgré son soutien au mouvement des « gilets jaunes », voit ses suffrages de la présidentielle divisés par trois. Quant aux candidats se réclamant des « gilets jaunes », ils présentent trois listes concurrentes et ne parviennent pas à cristalliser dans les urnes leur mouvement, qui pour l’instant profite essentiellement au Rassemblement national (RN).
Ces élections consacrent le duo LRM-RN (60 p. 100 des sièges à eux deux) en tant que forces politiques dominantes en France. La médiocre campagne de la liste présidentielle menée par Nathalie Loiseau et l’absence de personnalités marquantes en son sein (à l’exception de l’ancien ministre écologiste Pascal Canfin) expliquent qu’elle recueille presque 208 000 voix de moins que celle de Marine Le Pen. Les suffrages de l’électorat ouvrier se portent largement sur la liste d’extrême droite (à 40 p. 100 selon une étude Ipsos-Sopra Steria pour France Télévisions, Radio France, RFI et France 24). Il en va de même pour ceux des chômeurs (29 p. 100) et ceux des salariés (25 p. 100), alors que les jeunes de moins de 35 ans privilégient la liste écologique EELV, en particulier quand ils sont diplômés. Les retraités et les cadres placent LRM en tête, même si les premiers votent de plus en plus pour le RN. On constate aussi qu’un quart des électeurs ayant choisi Emmanuel Macron au premier tour de la présidentielle se sont reportés sur les listes socialiste ou écologiste, témoignant d’une certaine désaffection des électeurs de gauche à l’égard de l’exécutif.
Malgré ces résultats déroutants, voire inquiétants, la participation à une élection européenne atteint son plus haut niveau depuis 1994. Les jeunes continuent cependant de s’abstenir davantage[...]
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Écrit par
- Nicolas TENZER : président du Centre d'étude et de réflexion pour l'action politique, enseignant à Sciences Po, Paris
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Médias