FRANCE L'année politique 2022
Une droite incertaine, une gauche sans axe
Passée la période électorale, la plupart des partis politiques sont conduits à des changements internes.
À LR, affaibli par le score de sa candidate, par ses divisions internes et par le ralliement déjà ancien de plusieurs cadres à la majorité présidentielle, un renouvellement de la direction était inévitable. En juin, au lendemain du second tour des élections législatives, le président du parti, Christian Jacob, démissionne de ses fonctions – qu’il occupait depuis 2019. Laurent Wauquiez ne souhaitant pas diriger LR, le parti se retrouve sans « candidat naturel », ce qui amène le bureau politique à repousser la désignation de son nouveau président en décembre. Trois candidats prétendent à la succession de Christian Jacob. Aurélien Pradié est éliminé au premier tour, puis Éric Ciotti – par ailleurs député des Alpes-Maritimes depuis 2007 – remporte le second face à Bruno Retailleau, avec 53,7 % des suffrages exprimés (30,3 % des adhérents du parti se sont abstenus). Ce choix est révélateur du glissement d’une grande partie des militants républicains vers la droite dure – Ciotti avait en effet affirmé qu’en cas de second tour Macron-Zemmour, il voterait pour le candidat de Reconquête ! sans hésiter. De fait, LR est structurellement pris en étau entre l’extrême droite et la majorité présidentielle (qui attire les éléments les plus modérés du parti).
En septembre 2022, LRM change de nom et devient officiellement Renaissance. Il intègre les petits partis Agir et Territoires de progrès (aile gauche du parti), mais ne réalise pas le souhait initial d’Emmanuel Macron de fonder « un grand mouvement politique » incorporant les partisans d’Édouard Philippe et de François Bayrou. Le député européen Stéphane Séjourné, ancien collaborateur du président, est élu secrétaire général du nouveau parti. Celui-ci, intimement lié à la personne même d’Emmanuel Macron (il en est le président d’honneur), est porteur d’une difficulté quasi existentielle : qui sera son candidat à la prochaine élection présidentielle de 2027, puisque le président sortant ne peut se présenter une troisième fois ?
En novembre, Jordan Bardella, eurodéputé et président par intérim du RN, est élu président du parti lepéniste, avec 85 % des voix, face à son adversaire Louis Aliot. Marine Le Pen, en effet, a choisi de se consacrer à la présidence de son groupe parlementaire pour y poursuivre sa stratégie de « dédiabolisation », parfois mise à mal par les outrances verbales de certains de ses députés. Mais il semble clair, pour la fille de Jean-Marie Le Pen, que c’est désormais au Palais-Bourbon que se joue l’avenir de son parti.
En décembre, Marine Tondelier prend la tête d’EE-LV, à l’issue d’un scrutin remporté à 90,8 % des voix. Élue sur une motion de synthèse, elle espère surmonter les divisions internes nées de la campagne présidentielle, ainsi que le médiocre résultat de Yannick Jadot, tout en tournant la page de l’affaire qui a amené son prédécesseur Julien Bayou à démissionner – il a été accusé de violences psychologiques par son ex-compagne et plusieurs autres femmes.
À LFI, la question du leadership est posée de facto dès le lendemain des élections. LFI n’est pas un parti politique classique, mais un « mouvement », un « collectif » sans règlement détaillé et, tout comme le parti présidentiel, fortement tributaire de la figure de son fondateur. Or Jean-Luc Mélenchon n’est plus député et il a déclaré souhaiter « être remplacé » et ne pas être « candidat à la candidature permanente » à la présidentielle, ce qui place LFI dans une situation équivalente à celle du parti présidentiel. Qui sera la personnalité susceptible de l’incarner ? Les accusations qui, en juillet, frappent le président insoumis de la commission des finances de l’Assemblée nationale Éric[...]
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Écrit par
- Nicolas TENZER : président du Centre d'étude et de réflexion pour l'action politique, enseignant à Sciences Po, Paris
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Médias