FRANCISCAINS
François d'Assise et l'origine des Franciscains
Les sources mêmes reflètent les conflits qui, dès le début, opposèrent les interprètes de l'expérience de François d'Assise et de son enseignement, si bien qu'un certain mystère entoure les origines et le sens du franciscanisme. Il semble que très tôt François d'Assise ait donné les signes d'une mission hors de pair, marquée d'abord par un anticonformisme aigu. Né en 1182 à Assise en Ombrie dans une famille commerçante, il appartient à la bourgeoisie urbaine d'une cité d'importance secondaire, où jouaient les rivalités entre pape et empereur, nobles et bourgeois, catholiques et cathares. François grandit dans une atmosphère tendue et reçoit une éducation traditionnelle, peu adaptée au monde nouveau. Aussi ne tarde-t-il pas à chercher sa voie, se sentant comme en rupture avec la situation qui lui est faite : celle d'un christianisme usé dans une société désorganisée. Il rêve de chevalerie, pour échapper à l'ordre faussement établi. Mais la guerre, la captivité, la maladie, puis une suite de songes, de visions, le font renoncer à ses rêveries. Il rencontre alors le Christ comme une personne actuellement vivante qui s'adresse à lui personnellement. Il sert les lépreux et fait parmi eux la découverte de l'amour des plus pauvres. Puis le crucifix de l'église Saint-Damien lui parle : « François, va et répare ma maison qui tombe en ruine. » François hésite, comprend mal ces interventions de Dieu dans son existence ; il quitte ses bruyants compagnons de jeunesse, sa famille qui lui fait un procès, toutes les conventions d'une existence qui lui paraît maintenant à rebours de l'Évangile, et, pendant près de trois ans, il attend la lumière sur sa vraie vie. Il la trouve en comprenant, le 24 février 1209, jour de la Saint-Mathias, le sens des conseils que Jésus donne à ses apôtres : vie errante dans la pauvreté pour être libre et prêcher à toute créature la bonne nouvelle de la rédemption par le Christ. Alors l'imprévu arrive : des compagnons se présentent à lui pour partager son genre d'existence et son apostolat. François leur demande simplement de donner leurs biens aux pauvres et de vivre selon l'Évangile. Il les appelle « Frères mineurs », petits, soumis à tous, les derniers de tous. Ce sont comme lui des jeunes gens d'Assise ou des environs, tant laïcs que prêtres, qui vagabondent, mendient, chantent, réconcilient les ennemis, proclament la parole de Dieu, prêchent la pénitence et l'eucharistie. Ils sont bientôt douze, et vont à Rome demander au pape de confirmer le mode de vie qu'ils ont choisi. C'est déjà toute la réalité du franciscanisme, et jamais ce dernier n'a été aussi pur que durant ces années de 1209 à 1217.
Ce qui advint ensuite peut se résumer en un « passage du mystique au politique ». L'élan prophétique de François va s'institutionnaliser et cet affrontement aux structures sera la force du franciscanisme en même temps que sa faiblesse. L'Église, qui cherche sa réforme intérieure sous l'impulsion d'hommes tels qu'Innocent III et Hugolin (le futur Grégoire IX), utilise le dynamisme de François et des siens pour en faire un des moyens de cette réforme. Il en va sensiblement de même avec saint Dominique et sa fondation, inséparable de l'initiative franciscaine. Ainsi, du vivant même de son initiateur, l'ordre franciscain amorça son évolution. La règle définitive est approuvée par Honorius III le 29 novembre 1223 ; trois ans plus tard, dans son Testament, François témoigne déjà de sa propre nostalgie des origines.
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Écrit par
- Willibrord-Christiaan VAN DIJK : frère mineur capucin, bibliothécaire provincial.
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