BAYROU FRANÇOIS (1951- )
François Bayrou occupe une position particulière dans la vie politique française. Résolument ancré au centre, ce fervent partisan d'une Europe fédérale entend incarner une troisième voie, alternative à la traditionnelle opposition droite-gauche.
Le parcours qui le mène au métier politique est également atypique, comparé à celui des autres dirigeants politiques de sa génération. Il découvre la politique en famille (son père et son grand-père ont été maires) dans la ferme de ses parents à Bordères (Pyrénées-Atlantiques), où il voit le jour le 25 mai 1951. Il fait ses études loin des grandes écoles parisiennes, à l'université de Bordeaux-III. Le décès brutal de son père en 1974, alors que le jeune homme vient d'être reçu à l'agrégation de lettres classiques, oblige pendant près de cinq années François Bayrou à mener de front les métiers de professeur et d'agriculteur, tout en militant au Centre démocrate de Jean Lecanuet.
Cette première expérience professionnelle, entre agriculture et littérature, marque sa carrière gouvernementale. En 1979, il entre au cabinet du ministre de l'Agriculture Pierre Méhaignerie et devient rédacteur en chef de Démocratie moderne, le journal du CDS. Lorsqu'il entre au gouvernement en 1993, c'est comme ministre de l'Éducation nationale. Il y reste jusqu'en 1997 bien qu'il n'ait pas soutenu la candidature de Jacques Chirac à l'élection présidentielle de 1995 et malgré une position peu confortable. Ministre centriste dans des gouvernements majoritairement gaullistes, il doit en effet affronter des fonctionnaires réputés de gauche. Cela ne le prive pourtant pas d'audaces : si l'on ne peut réduire son action à la tête de ce ministère à ce seul épisode (il conduira notamment une entreprise de concertation assez remarquée sur les conditions de travail des enseignants et des élèves), il jette près d'un million de manifestants dans la rue et réactive la querelle séculaire entre les « hussards noirs » de la République et les défenseurs de l'enseignement libre pour avoir tenté de faire réviser la loi Falloux au profit de l'école privée (1994).
François Bayrou se dit pourtant profondément laïc dans ses engagements publics, même s'il est profondément chrétien dans sa vie privée. Ce catholique pratiquant, père de six enfants, répugne en effet à mélanger ses convictions religieuses et ses opinions politiques. Il refuse ainsi l'hypothèse d'un parti qui pourrait associer l'adjectif chrétien à son nom, car il ne veut pas « que le terme chrétien soit en position d'être sali par la politique ». De même, il se dit contre l'avortement à titre privé mais défend fermement la loi Veil en public.
Ces positions particulières ne facilitent pas sa carrière politique, au niveau tant local que national. S'il est membre du conseil général des Pyrénées-Atlantiques de 1982 à 2008 (qu’il préside de 1992 à 2001), cet enfant du Béarn ne parvient pas à se faire élire maire de Pau et, au premier tour de l'élection présidentielle de 2002, celui qui se voulait le « troisième homme » n'arrive qu'en cinquième position dans sa propre région. Sur le plan national, le bilan est tout aussi mitigé. Depuis 1986, et malgré les nombreuses alternances, la victoire est au rendez-vous à chaque fois qu'il se présente aux élections législatives (1986, 1988, 1993, 1997, 2002 et 2007) ou européennes (1999). En revanche, il peine beaucoup à voir ses ambitions partisanes se réaliser. S'il prend la tête du CDS dès 1994 (en le rebaptisant au passage Force démocrate) et conquiert l'UDF en 1998, sa stratégie d'émancipation vis-à-vis de la droite, qui le pousse à promouvoir des candidatures UDF au détriment d'alliances avec les gaullistes, n'est pas très convaincante sur le plan[...]
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Écrit par
- Delphine DULONG : docteur en science politique, maître de conférences en science politique à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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