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BLOCH-LAINÉ FRANÇOIS (1912-2002)

D'une famille bourgeoise au service de la haute fonction publique depuis plusieurs générations, François Bloch-Lainé obtient, après des études au lycée Janson-de-Sailly, le doctorat en droit et le diplôme de l'École libre des sciences politiques de Paris. Ne s'estimant pas « bon à tout faire » et refusant toute carrière dans la politique ou dans les affaires, il entre au service de l'État comme on entre en religion. Nommé à l'Inspection des Finances en 1936, il affronte la guerre, la défaite, et retrouve son poste à la direction du Trésor. La conversion au catholicisme de sa grand-mère juive lui évite de tomber sous le coup des lois antijuives édictées par le régime de Vichy. Entré dans la Résistance dès 1940, il est nommé en 1943 par Alexandre Parodi trésorier du comité financier chargé de collecter des fonds. Après la Libération, il passe rapidement au cabinet de René Pleven, devient sous-directeur du Trésor en charge du contrôle des changes. Il dirige en 1946 le cabinet de Robert Schumann, ministre des Finances. Alors que ses jeunes camarades, Chaban-Delmas, Bourgès-Maunoury et Debré débutent dans la vie politique, il persiste dans la fonction publique et, à trente-cinq ans, devient directeur du Trésor. C'est le père du Trésor moderne, dira Laurent Fabius en inaugurant la salle qui porte son nom à Bercy.

En 1952, François Bloch-Lainé est en désaccord avec Antoine Pinay, son ministre, qui met fin à ses fonctions et lui propose la direction de la Caisse des dépôts, établissement somnolent mais qui gère une masse considérable de fonds. Il y reste quinze ans, bouleversant l'institution pour en faire un levier majeur du développement économique et social de la France. Mobilisant les ressources de la Caisse, il crée des outils modernes, puissants comme la S.C.I.C., le grand promoteur immobilier du logement social, la S.C.E.T. et des bureaux d'études accompagnant le financement des collectivités publiques dans l'équipement du territoire. Le tourisme social, l'accueil des jeunes travailleurs et des personnes âgées feront l'objet de structures adaptées avec des financements originaux.

En 1967, Michel Debré lui propose la présidence du Crédit lyonnais pour mettre de l'ordre dans une direction générale éclatée. Il adapte la banque aux nouvelles exigences du système bancaire qui se libéralise. Il sera évincé de ce poste en 1974, sans nouvelle affectation, par Valéry Giscard d'Estaing. Ce dernier lui avait gardé rigueur d'un événement qui aurait dû plutôt le satisfaire. En refusant pour la seconde fois, en 1962, le ministère des Finances que lui offrait de Gaulle, Bloch-Lainé laissait en effet le champ libre au jeune et ambitieux secrétaire d'État. Cependant, nommé en 1981 par Mitterrand président de la commission du Bilan chargée d'évaluer l'action de l'ancien gouvernement, il se montre impartial et beaucoup trop nuancé : son rapport est enterré par le gouvernement Mauroy. Mitterrand oublie de le nommer grand-croix de la Légion d'honneur, oubli réparé par Jacques Chirac en 1999.

De 1974 à 1996, sa vie se confond avec les avancées du monde associatif. Son engagement civique plonge ses racines dans le scoutisme, son « christianisme social » l'avait amené à rencontrer les jeunes de banlieue de Saint-Ouen en 1930. Le contact du jeune bourgeois avec le monde ouvrier l'incite à voter à gauche en 1936 et à choisir comme sujet de thèse pour son doctorat : L'Emploi des loisirs ouvriers et l'éducation populaire. Fidèle aux idées de Mendès France, ses lourdes responsabilités à la Caisse des dépôts ne l'empêcheront pas de contribuer à une réflexion sur le rôle de l'État et des entreprises, dans le cadre du club Jean Moulin. En 1963, il écrit un livre, Pour une réforme de l'entreprise qui fera date et[...]

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Écrit par

  • : ancien président de la Société immobilière de la Caisse des dépôts, président du Comité de la charte de déontologie des associations humanitaires

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