CAVANNA FRANÇOIS (1923-2014)
Fils d’un maçon italien émigré et d’une Française originaire de la Nièvre, François Cavanna est né à Paris le 22 février 1923. Il a raconté avec tendresse son enfance prolétaire à Nogent-sur-Marne dans ses autobiographies. En 1943, il est requis par le Service du travail obligatoire et se voit affecté dans une entreprise de munitions à Berlin. Rentré d'Allemagne, il s'essaie au dessin et vit la « bohème » des dessinateurs de cette époque « relevant la liquette » (le carton à dessin rendu avec ceux qui ne sont pas publiés).
Il débute dans le journal LeDéporté du travail, puis publie une bande dessinée en feuilleton dans la revue pour enfants Kim et ses premiers dessins d'humour dans Ridendo, Marius, Le Hérisson, Ici Paris, La Presse, Radar, Le Figaro, etc.Il expose au Salon des humoristes et signe du nom de son chat, Sépia.
Grâce à son collègue Fred, il entre à Hebdo Latin en 1950, journal des étudiants qui devient Quartier Latin. Il travaille alors pour Jean Novi dans des revues vendues au colportage, Zéro (1954-1958) et Cordées (1954-1959). Il en sera successivement le secrétaire de rédaction, le rédacteur en chef adjoint (1954) et le rédacteur en chef (1957). Le directeur des ventes du groupe, Georges Bernier, devient directeur des revues à la mort de Jean Novi (1959) et forme un binôme avec Cavanna qui écrit, conçoit des jeux et la maquette. Il est aussi rédacteur en chef de la revue pour les jeunes Première chance (1956-1959) et co-écrit et illustre un livre sur Le Tour de France (1960).
Le rédacteur en chef de « Hara-Kiri » et « Charlie Hebdo »
En 1960, cette solide équipe – Cavanna, Fred et Bernier – crée Hara-Kiri. Ce mensuel sous-titré « bête et méchant » prend vite une place inédite dans la presse française : un satirique à l'humour délibérément noir, sans complaisance ni indulgence, privilégiant l'absurde et le mauvais goût, choquant les bien-pensants avec des slogans comme « Achetez Hara-Kiri, sinon volez-le ! ». Des interdictions et des procès émailleront son existence, mais ses fausses publicités, ses détournements de photos ou de gravures anciennes, ses textes iconoclastes et ses dessins feront sa gloire. En composant l’équipe de dessinateurs, Cavanna va révéler de nombreux jeunes talents tels que Roland Topor, Jean-Marc Reiser, Georges Wolinski, Cabu, le futur écologiste Pierre Fournier, Gébé, le hollandais Willem et l'allemande Sonja Hopf. Quant aux textes, ils sont essentiellement de la plume de Delfeil de Ton et de Cavanna lui-même, qui en écrit de plus en plus et délaisse le dessin.
Aux Éditions du Square qu'ils ont créées, Bernier – devenu Professeur Choron – et Sépia – qui signe désormais de son nom Cavanna – ont aussi conçu le mensuel Baladin de Paris (1960-1963). Quand Mai-68 arrive, l'équipe rédactionnelle et les dessinateurs se mobilisent dans les journaux d’extrême gauche, à l’exception de Cavanna qui est hospitalisé. Avec la même équipe, il crée Hara-Kiri Hebdo (1969), puis après son interdiction, Charlie Hebdo (1970). Entre-temps, Charlie mensuel, composé entièrement de bandes dessinées pour adultes, est né (1969), dirigé par Delfeil de Ton puis Wolinski. Ils lanceront aussi une version française de Mad, puis La Gueule ouverte (dirigée par Fournier) et enfin BD hebdo.
En 1981, avec la défaite des partis de droite et l'arrivée de la gauche au pouvoir, le journal satirique peine à trouver de nouveaux sujets de contestation. Son ascension est interrompue. Charlie hebdo s'arrête en 1982 et Hara-Kiri mensuel survit jusqu'en 1987. Cabu et Philippe Val (venu de l’hebdomadaire LaGrosse Bertha) relanceront le titre Charlie Hebdo en 1992, Cavanna continuera d’y donner sa chronique jusqu'à son dernier souffle.
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Écrit par
- Yves FRÉMION : écrivain et critique de la bande dessinée
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CHARLIE HEBDO
- Écrit par Yves FRÉMION
- 995 mots
- 4 médias