FÉTIS FRANÇOIS-JOSEPH (1784-1871)
Né à Mons, élève de Rey (harmonie), de Boieldieu et de Pradher (piano), professeur et bibliothécaire au Conservatoire de Paris, Fétis fonde, en 1827, les « concerts historiques » et la Revue musicale. En 1833, il devient directeur du Conservatoire de Bruxelles et maître de chapelle de Léopold Ier ; il vivra en Belgique jusqu'à sa mort. Quoique importante (quatre opéras, trois symphonies, pièces pour piano et musique de chambre), son œuvre de compositeur est peu intéressante. Son œuvre théorique est d'une autre valeur. Outre quantité de petits ouvrages pédagogiques (solfèges, méthodes de chant, de piano, de composition), son Traité complet de la théorie et de la pratique de l'harmonie(1844), faisant suite au Traité du contrepoint et de la fugue (1824), est d'une grande importance. Fétis s'est attaché, entre autres choses, à montrer que l'harmonie n'est pas statique, donnée une fois pour toutes par des lois naturelles, mais qu'elle se constitue et évolue selon des tendances d'origine culturelle : idée fort moderne et audacieuse en son temps. Fétis aurait voulu composer une vaste encyclopédie de la musique, réunissant en un système général et rationnellement structuré l'ensemble des connaissances musicales. Du moins le Résumé philosophique de l'histoire de la musique, publié en 1832 comme préface à sa Biographie universelle des musiciens et bibliographie générale de la musique, esquisse-t-il cette synthèse et fait regretter que la mort ait empêché l'achèvement de son Histoire générale de la musique ; les parties complètement rédigées montrent une remarquable tentative d'élargir la vision de l'histoire musicale, d'y intégrer les musiques non occidentales et l'ethnographie. Sa Biographie universelle... (8 vol., 1re éd., Bruxelles, 1837-1844 ; 2e éd. rev. et compl., Paris, 1860-1865) n'est certes pas exempte de défauts, d'erreurs et de lacunes. Elle constitue néanmoins, en langue française, le premier ouvrage de cette ampleur, utilisant toutes les ressources de la critique, et demeure précieuse comme source d'informations, en particulier sur les musiciens français.
Un des grands mérites de Fétis aura été, dans les « concerts historiques » qu'il fonde, de révéler à la génération de 1830 maint chef-d'œuvre musical de la Renaissance. Avec les musiciens de son temps, il aura la main moins heureuse : Fétis est allé jusqu'à corriger les imperfections et les erreurs qu'aperçoit son œil d'aigle dans les partitions, estimables mais négligées quant à l'observation des règles, d'un musicien nommé Beethoven. Ce sera Berlioz qui se donnera « l'âcre douceur de venger Beethoven » (Mémoires, xliv) : dans le « monodrame » parlé, et entrecoupé de musique, de son Lélio (1832), Berlioz fait « maudire » Fétis en pleine salle de concert par l'acteur Bocage qui, au nom de Lélio, dénonce « ces tristes habitants du temple de la Routine [...], ces jeunes théoriciens de quatre-vingts ans [...], ces vieux libertins qui ordonnent à la musique de les caresser [...], ces profanateurs qui osent porter la main sur les ouvrages originaux, leur font subir d'horribles mutilations qu'ils appellent corrections, et perfectionnements pour lesquels, disent-ils, il faut beaucoup de goût ».
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Écrit par
- Philippe BEAUSSANT : directeur de l'Institut de musique et danse anciennes de l'Île-de-France, conseiller artistique du Centre de musique baroque de Versailles
Classification
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