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PÉRIER FRANÇOIS (1919-2002)

François-Gabriel Pillu, né à Paris le 10 novembre 1919, est fils de petits commerçants. Il s'amuse tout jeune à embellir la banalité du quotidien en l'ornant des scintillements de son imagination. Il jouait déjà des rôles, d'où le titre qu'il choisit par la suite pour son livre de souvenirs : Profession, menteur (1990). Le temps venu de gagner sa vie, il débute comme courtier d'assurances mais fréquente le cours René Simon, s'inscrit au Conservatoire, et tient sous un nouveau nom de modestes emplois à la Comédie-Française. Louis Jouvet remarque François Périer, et lui inculque le respect et la rigueur d'une profession qui ne tolère nulle défaillance.

En 1938, au théâtre Michel, Colette ajuste sa jumelle noire pour scruter un comédien en fleur : « Le don merveilleux, dit-elle, supplée à l'étude puisqu'un François Périer est, à dix-neuf ans, un comique accompli. » Le titre de la comédie de Claude-André Puget, Les Jours heureux, reflète la joie avec laquelle le jeune espoir s'installe dans le succès. Des cinéastes chevronnés lui confient aussitôt des silhouettes qu'il crayonne au mieux : Marcel Carné (Hôtel du Nord, 1938), Albert Valentin (L'Entraîneuse, 1938), Julien Duvivier (La Fin du jour, 1939). Serge de Poligny avec le rôle-pivot du Veau gras (1939), d'après Roger Vitrac, lui offre davantage. François Périer doit s'imposer face à des partenaires redoutables et statufiés : Elvire Popesco, André Lefaur, Robert Le Vigan, Armand Bernard et Dorville. La confrontation tourne à son avantage. La guerre d'abord, l'Occupation ensuite ne freinent pas son élan. Bientôt, il alignera sans doute trop de comédies troussées par Jean Stelli (La Tentation de Barbizon, 1945), Gilles Grangier (L'Amour Madame, 1951), Guy Lefranc (Capitaine Pantoufle, 1953). Un critique lui crie casse-cou et lui rappelle les performances des films d'Autant-Lara (Lettres d'amour, 1942 ; Sylvie et le fantôme, 1945), de René Clair (Le silence est d'or, 1946), de Christian-Jaque (Un revenant, 1946), ou de Cocteau (Orphée, 1949). L'avertissement est entendu. Tant en France qu'en Italie, François Périer diversifie ses rôles, sans craindre les compositions : La Souricière (Henri Calef, 1949), Gervaise (René Clément, 1955), Les Nuits de Cabiria (Federico Fellini, 1956), Les Camarades (Mario Monicelli, 1963). Les films de Jean-Pierre Melville (Le Samouraï, 1967 ; Le Cercle rouge, 1970), Costa-Gavras (Z, 1968), Claude Sautet (Max et les Ferrailleurs, 1970), ou Alain Resnais (Stavisky, 1970) donneront lieu à d'autres créations remarquables.

Au théâtre, François Périer sait garder l'oreille du public. Par trois fois il double le cap des mille représentations : grâce aux J3, bluette de Roger Ferdinand sur les collégiens des temps difficiles, d'abord. Dans Bobosse, il récidive en soutenant à lui seul la comédie d'André Roussin. Avec Gog et Magog, variation de Gabriel Arout sur le thème des sosies vrais ou faux, il fournit, à la faveur d'un monologue, la démonstration éblouissante d'un métier constamment enrichi.

Sartre lui avait proposé en 1948 d'aborder un nouveau registre : le succès qu'il connaît avec Les Mains sales l'autorisera, vingt ans plus tard, à reprendre le rôle de Goetz, créé par Pierre Brasseur dans Le Diable et le Bon Dieu. Comme il avait assuré en 1964 la mise en scène des Séquestrés d'Altona, Sartre reste à coup sûr son auteur de prédilection. Mais François Périer continue de surprendre en campant avec la même rectitude tantôt Tartuffe, tantôt Orgon. On le voit également dans Mort d'un commis voyageur, en 1988. Et, s'affrontant à Polanski-Mozart, il nuance un Salieri venimeux dans Amadeus.

François Périer a été marié à Jacqueline Porel, puis à Marie Daëms. Codirecteur du théâtre de La[...]

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