FRANÇOIS XAVIER saint (1506-1552)
Né dans un castillo (gentilhommière campagnarde), Javier en Navarre, François (Francisco de Yasu y Javier) était le sixième enfant d'un docteur en droit de l'université de Bologne, employé au service du souverain français Jean d'Albret. Deux de ses frères se compromirent dans les troubles militaires qui précédèrent l'annexion de la Navarre à l'Espagne ; en représailles, sa demeure fut démantelée. Comme tant de cadets de famille, il fut destiné de bonne heure à occuper une prébende ecclésiastique à la cathédrale voisine de Pampelune. Le docteur Navarro, son aîné de douze ans, dit qu'il « était doux, aimable, poli, gai, plaisant même, d'une singulière pénétration d'intelligence, curieux d'apprendre, jaloux d'exceller en tout ce qui fait le gentilhomme accompli, de sorte que, cher à tous les siens, il ravissait dès l'abord ceux qui ne l'avaient jamais vu : péril redoutable auquel il n'eût point échappé sans le don d'une naturelle réserve, d'une virginale pudeur que tous admiraient en lui ».
À dix-huit ans, après une sommaire éducation, il se décida à aller quérir des degrés universitaires à Paris, qui abritait les courants les plus variés de la Renaissance humaniste. Il y retrouvait les réfugiés de la petite dynastie française de Navarre. Dans le collège de Montaigu, il fut gagné par le Savoyard Pierre Favre à la conduite spirituelle d'un grand « mouleur d'hommes », le Basque Inigo (Ignace) de Loyola. Renonçant à la carrière ecclésiastique, il s'adjoignit, le 15 août 1534, au petit groupe des futurs fondateurs de la Compagnie de Jésus. Il fut reçu le vingt-deuxième à l'examen de licence en 1530 et, grâce aux démarches de Loyola, pourvu d'une chaire de régent au collège Saint-Jean de Beauvais ; il y eut pour commensal un poète de Marguerite de Navarre, Nicolas Bourdon.
En novembre 1536, âgé de trente ans, il quittait Paris à destination, croyait-il, de la Terre sainte. En fait, avec les autres compagnons, il gagna Rome, obtint du pape Paul III un indult pour l'ordination de prêtrise et commença son apprentissage de missionnaire en Italie. Il exerçait les fonctions de secrétaire d'Inigo à Rome quand une requête inattendue du roi de Portugal Jean III l'arracha à l'Europe pour le plonger dans la chrétienté naissante de la côte de la Pêcherie dans l'Inde.
Parti de Lisbonne, il débarqua, le 6 mai 1542, après un séjour dans une escale à Mozambique, dans la cité de Goa, capitale administrative et religieuse des immenses régions soumises à l'influence plus ou moins directe du droit de patronage (padroado). Entre-temps, il avait été accrédité comme nonce apostolique par un bref du pape. Un de ses premiers actes fut de prendre en charge un établissement scolaire qui venait d'être fondé pour les adolescents du pays. Ses lettres à Ignace de Loyola, presque immédiatement divulguées par l'imprimerie en Europe (1545), provoquèrent un véritable engouement pour les missions. Grâce à elles, on peut le suivre à Goa, d'abord, puis dans le sud de l'Inde (côte de la Pêcherie, Travancore) ; on le voit revenir à Goa, passer ensuite à Cochin, de Cochin à Tuticorin, de Tuticorin à Malacca, de Malacca aux Moluques, où il retrouva les émules espagnols des Portugais. Chemin faisant, au cours de ses interminables pérégrinations, il commençait par évangéliser ses compatriotes européens, et il jetait les premières bases d'une approche des hindous. Les résultats de son activité incessante, inconsidérément magnifiés par ses admirateurs en Europe, le mettaient peu à peu en contact avec les couches populaires des autochtones, sans qu'il eût le temps ni la possibilité d'approfondir auprès des élites leurs croyances religieuses et leurs conceptions philosophiques. Avec les auxiliaires qui, peu à peu, lui arrivaient du Portugal,[...]
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Écrit par
- Henri BERNARD-MAITRE : licencié ès sciences mathématiques, membre correspondant de l'École française d'Extrême-Orient
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