- 1. Le premier pape sud-américain
- 2. Un souverain pontife au style original
- 3. Réformer, un impératif du pontificat du pape François
- 4. Les adversaires du pape François
- 5. Le pape François et la crise des migrants
- 6. Sortir de l’Église des abus sexuels
- 7. François, pape de la sauvegarde de la Création
- 8. Renouer avec Vatican II
- 9. Bibliographie
FRANÇOIS (1936- ), pape (2013- )
Sortir de l’Église des abus sexuels
En 2013, le pape François hérite de ce qu’on a appelé l’« Église des abus ». Benoît XVI avait été parmi les premiers à alerter sur les abus sexuels et spirituels commis par des prêtres et des religieux, et ce dès le début des années 2000 quand il était préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi. C’est cependant sous le pontificat de François que l’Église est frappée de plein fouet par les révélations sur la pédocriminalité des clercs et sur les abus sexuels commis sur des femmes. Or pour les victimes, comme pour nombre d’observateurs, le bilan du pape n’est guère satisfaisant. Malgré les nombreuses mesures de sauvegarde et les sanctions sévères prises contre les auteurs d’abus sexuels (y compris leur défèrement devant la justice civile), malgré la réforme promulguée en 2021 du Livre VI du Code de droit canonique – qui prévoit des sanctions pénales contre les coupables de « délits sexuels » et plus seulement de « péchés contre la chasteté » –, François donne une impression d’ambivalence ou d’hésitation face à la question des abus sexuels et spirituels dans l’Église.
Il soutient ainsi longtemps le cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon, accusé d’avoir permis sciemment le retour d’un prêtre criminel à la tête d’une paroisse : il considère que Barbarin a « bien pris les choses en main » et refuse sa démission en 2019. Après la relaxe du cardinal par la justice civile en janvier 2020, François finit par accepter sa démission, tout en lui rendant encore un hommage appuyé à Assise en 2021. Les victimes du prêtre et leurs soutiens considèrent que, malgré sa relaxe, Philippe Barbarin a failli et englobent François dans leur réprobation. En France, il déçoit une fois de plus ses partisans en refusant de recevoir les membres de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (CIASE) présidée par Jean-Marc Sauvé et dont le rapport accablant – critiqué par une partie de l’Académie catholique – a été remis en octobre 2021. Dans l’affaire des très graves abus sexuels commis au Chili par un prêtre renvoyé de l’état clérical en 2011, il ignore les accusations de complicité qui accablaient l’évêque d’Osorno, Mgr Juan Barros. Il déclare ainsi au début de 2018 : « Il n’y a aucune preuve contre lui. Tout cela est de la calomnie. C’est clair ? » Après avoir plusieurs fois refusé la démission du prélat, François doit reconnaître son erreur quand il est confronté au rapport accablant de son envoyé spécial, l’archevêque Charles Scicluna. Fait unique dans l’histoire de l’Église, tous les évêques du Chili lui remettent collectivement leur démission en mai 2018 – il accepte celle de trois d’entre eux, dont celle de Mgr Barros. Par ailleurs, toujours en 2018, un rapport du département de la Justice de l’État de Pennsylvanie (États-Unis) fait état de plus de mille victimes d’abus pédocriminels commis par environ trois cents prêtres pendant soixante-dix ans. À la même période, François se rend en Irlande, où il est confronté au récit des nombreux abus commis par des prêtres, tout en subissant les attaques de Mgr Carlo Maria Vigano, un traditionaliste, ancien nonce aux États-Unis, qui l’accuse d’avoir couvert l’archevêque de Washington accusé d’abus sexuels.
Le 20 août 2018, François publie finalement une « Lettre au peuple de Dieu » où il demande à tous les catholiques de s’engager activement pour lutter contre le fléau de la pédophilie. Il y dénonce le « cléricalisme », cette maladie catholique de l’entre-soi, entretenu par le « système » du silence interne des institutions religieuses (paroisses, écoles, troupes scoutes, mouvements de jeunes, communautés religieuses…), qui préfèrent protéger les criminels (prêtres, religieux, religieuses, laïcs) plutôt que les victimes. [...]
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Écrit par
- Jean-Louis SCHLEGEL : sociologue des religions, éditeur, traducteur
Classification
Médias
Autres références
-
BENOÎT XVI JOSEPH RATZINGER (1927-2022) pape (2005-2013)
- Écrit par Encyclopædia Universalis et Raymond WINLING
- 2 491 mots
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Après sa renonciation et l'élection de François à la tête de l'Église, il a vécu presque dix années au monastère Mater Ecclesiæ, au Vatican, en portant le titre inédit de « pape émérite ». Conformément aux engagements qu'il avait pris de faire « preuve de révérence et d’obéissance inconditionnelle...