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FRANÇOIS (1936- ), pape (2013- )

Article modifié le

Renouer avec Vatican II

La réforme de la curie initiée par François a abouti au renforcement du pouvoir du pape. Ce paradoxe peut s’expliquer par les résistances auxquelles il a été confronté dès le début de son pontificat. Le refus de toute réforme, de la part des membres haut placés de la curie, du Collège cardinalice ou des catholiques traditionalistes, l’a amené à se donner les moyens de quelques avancées réformatrices décidées motu proprio (de son « propre mouvement »). Ainsi de la promotion dans les instances curiales de femmes (fussent-elles surtout des religieuses) ; ainsi, surtout, de « permissions » relatives à l’accueil des homosexuels dans l’Église. Dans ce domaine, la déclaration Fides supplicans du 18 décembre 2023, du dicastère pour la Doctrine de la foi, autorisant la bénédiction par un prêtre de couples en situation « irrégulière » (divorcés remariés) et de couples homosexuels, marque une étape retentissante. À cette occasion, François s’est exposé personnellement à une levée de boucliers sans précédent, y compris de la part de théologiens et d’évêques non traditionalistes, et en particulier à l’opposition farouche, au nom de l’identité culturelle, d’évêques africains qui voient dans cette permission une marque typique de l’« Occident » dévoyé.

Au fond, le pape François a voulu renouer avec le souffle et les ruptures du concile Vatican II (1962-1965), mais sa volonté de réformes s’est heurtée à des oppositions multiples. Si bien que, malgré sa popularité, son bilan concret reste maigre, en particulier sur les questions du statut des prêtres, de la place des femmes dans l’Église et du fonctionnement des pouvoirs ecclésiastiques. Le « cléricalisme » et le silence systémique sur les maux de l’Église n’ont pas disparu, le plus préoccupant restant sans doute l’affirmation d’un clivage, en partie générationnel, entre des catholiques « conciliaires » avides d’ouverture et de dialogue avec le monde et des catholiques tentés par un repli identitaire qui leur permettrait de donner à l’Église une visibilité nette, traditionaliste et faite de « repères » solides.

Durant le pontificat de François, les conflits dans l’Église catholique se sont donc installés « au sommet ». Cependant, malgré la relative modestie des réformes entreprises, on peut dire qu’il a changé l’image de la papauté, la rendant moins formelle, moins en surplomb, plus proche des faibles et des petits. Cette façon d’être et de faire a été appréciée à travers le monde, y compris en dehors des milieux catholiques. Si, comme le dit l’expression proverbiale, le style c’est l’homme, il incarne aussi l’institution : il sera difficile au successeur de François de revenir à l’Église d’avant Vatican II, même si ce rêve hante nombre de ces catholiques qui ne lui pardonnent pas d’avoir succédé à Benoît XVI.

(Voir égalementCITÉ DU VATICAN, chronologie contemporaine)

— Jean-Louis SCHLEGEL

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Bénédiction papale du pape François - crédits : Maurix/ Gamma-Rapho via Getty Images

Bénédiction papale du pape François

Le pape François - crédits : Alessandra Benedetti/ Corbis News/ Getty Images

Le pape François

Le pape François et le pape émérite Benoît XVI - crédits : Maurix/ Gamma-Rapho/ Getty Images

Le pape François et le pape émérite Benoît XVI

Autres références

  • BENOÎT XVI JOSEPH RATZINGER (1927-2022) pape (2005-2013)

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    • 2 491 mots
    • 1 média
    Après sa renonciation et l'élection de François à la tête de l'Église, il a vécu presque dix années au monastère Mater Ecclesiæ, au Vatican, en portant le titre inédit de « pape émérite ». Conformément aux engagements qu'il avait pris de faire « preuve de révérence et d’obéissance inconditionnelle...