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SEIGNER FRANÇOISE (1928-2008)

Elle aimait jouer les gardiennes du temple, dénonçant tout ce qui pouvait porter atteinte aux règles du classicisme et du répertoire de la « maison ». Elle appréciait les aventures, mais, disait-elle, à condition qu'elles soient de qualité. Elle avait d'ailleurs défendu des auteurs contemporains comme Jean Audureau avec Félicité, en 1983. Avec le décès de Françoise Seigner, le 13 octobre 2008, c'est une certaine idée de la Comédie-Française qui disparaît.

Née à Paris le 7 avril 1928, elle avait baigné dès l'origine dans l'univers du théâtre. Sa mère, Marie Cazeaux, avait été comédienne. Son père, l'acteur Louis Seigner, n'allait pas tarder à devenir l'une des grandes figures du Français en même temps qu'un artiste réclamé par le cinéma. Françoise Seigner est bien décidée à suivre ses traces. À vingt-deux ans, elle entre au Conservatoire dans la classe de Jean Yonnel. Elle en sort avec un deuxième prix de comédie classique et un premier accessit de comédie moderne. La Comédie-Française lui ouvre ses portes le 1er septembre 1953. Elle y joue dans une vingtaine de pièces, dont deux sont mises en scène par son père.

Désireuse de suivre son propre chemin, Françoise Seigner part au bout de trois ans. Elle rejoint la Compagnie Jacques Fabbri qui monte Les Joyeuses Commères de Windsor, gagne le T.N.P. où Georges Wilson met en scène Maître Puntila et son valet Matti, rencontre Roger Planchon qui lui offre le rôle de Dorine dans Tartuffe, en 1962... En 1965, elle est la partenaire de Michel Simon lors de la création de Du vent dans les branches de Sassafras, de René de Obaldia.

Deux ans plus tard, le 6 février 1967, la Comédie-Française la rappelle pour créer une pièce inédite de Marivaux : La Commère. « Je pensais n'y rester qu'un an », dira-t-elle. Elle n'en partira qu'en 1998. Directe et entière, geste énergique, verbe haut, physique généreux, sa nature impétueuse la voue naturellement, chez Molière, aux rôles de servantes (Dorine, Toinette) ou d'entremetteuse (Frosine). Elle jouera encore Feydeau, Labiche, Courteline...

Si elle s'impose dans le vaudeville et la comédie, Françoise Seigner va, avec le temps, élargir son répertoire. Passant de Montherlant (Port-Royal, en 1969), à Goldoni (La Trilogie de la villégiature, mise en scène par Giorgio Strehler en 1979), de Marivaux (La Double Inconstance, en 1981) à Racine (dans le rôle d'Agrippine dans Britannicus, en 1989), elle sert avec la même force O'Neill (Une lune pour les déshérités, en 1975) qu'Audureau (Félicité, créé par Jean-Pierre Vincent en 1983), Bernanos (Le Dialogue des carmélites en 1987) ou Italo Svevo et Nathalie Sarraute avec Un mari et Le Silence, deux spectacles réalisés par Jacques Lassalle en 1993. Elle signe aussi des mises en scènes au Français, au Théâtre des Célestins à Lyon, au Théâtre Mouffetard à Paris.

Ces activités laissent peu de place au cinéma. Françoise Seigner tourne cependant avec Truffaut dans L'Enfant sauvage (1970), avec Robert Hossein dans Les Misérables (1982), et avec Bernard Stora dans Le Jeune Marié (1983). À la télévision, elle participe à la grande saga tournée en 1993 par Hervé Baslé, Les Maîtres du pain.

Le 5 février 1998, Françoise Seigner décide de mettre un terme à sa carrière active au Français, et de n'être plus que sociétaire honoraire. Elle vit mal, en effet, l'évolution de la Comédie-Française imposée par les différents administrateurs désireux d'ouvrir la Maison au théâtre d'aujourd'hui. Retirée dans une semi-retraite, elle revient en 1998 à la mise en scène avec Le Mal de mère de Pierre-Olivier Scotto au Théâtre du Palais-Royal, à Paris. Elle reprend aussi régulièrement Le Mystère de la charité de Jeanne d'Arc, de Péguy, un texte qui la suit depuis vingt ans et[...]

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Écrit par

  • : journaliste, responsable de la rubrique théâtrale à La Croix

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