FENNER FRANK JOHN (1914-2010)
Le nom de l’Australien Frank Fenner est associé à deux événements majeurs en virologie médicale : d’une part le contrôle de la prolifération des lapins en Australie grâce au virus de la myxomatose au début des années 1950, d’autre part l’éradication de la variole en 1980.
Frank John Fenner est né le 21 décembre 1914 à Ballarat, ville minière de l’État de Victoria. Il grandit à Adélaïde (Australie-Méridionale), où il fait ses études universitaires, et devient médecin de l’université d’Adélaïde en 1942. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il est médecin major dans l’armée australienne et officie en divers lieux d’engagements militaires, dont la Papouasie où il se forme à l’épidémiologie, notamment celle du paludisme. Après-guerre, il travaille en tant qu’épidémiologiste sur différents sujets de médecine humaine (dont l’ulcère de Buruli) et animale, avant de se spécialiser en virologie. Il étudie tout particulièrement les poxvirus, un groupe de virus auquel appartiennent ceux de la variole, de la vaccine et de la myxomatose. Fenner est alors professeur de microbiologie à la John Curtin School of Medical Research à Canberra, dont il deviendra directeur en 1967.
En 1950, Frank Fenner travaille au contrôle biologique des lapins en Australie par l’utilisation du virus de la myxomatose. Cette dernière est une maladie mortelle chez certaines espèces de lapins – la létalité pouvant atteindre 99 p. 100 –, dont le virus est transmis par des diptères, des tiques et des puces. Cette diversité d’espèces vectrices qui possèdent des exigences environnementales variées explique les particularités géographiques des épidémies de myxomatose. Afin de faire décroître les populations de lapins dans des lieux où elles pullulent, plusieurs utilisations expérimentales du virus de cette maladie sur ces animaux sont tentées en Europe (îles Britanniques, Danemark), en Amérique du Sud et en Australie. En 1950, ces expérimentations sont relancées sur les terres australiennes sous la direction de Frank Fenner. Les lagomorphes y constituent en effet un véritable fléau pour l’agriculture. Du fait du climat australien qui limite la contagion aux périodes où les moustiques, vecteurs principaux en Australie, prolifèrent, l’expérience n’est un succès que dans les zones humides. En 1952, l’expérimentation dirigée par Fenner est une réussite puisque la population de lapins passe en quelques mois de 600 millions à moins de 200 millions. Cependant, l’apparition de résistances chez l’animal transforme progressivement ce succès en relatif échec avec l’expansion de populations résistantes.
En 1979, Fenner est nommé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) directeur de la commission chargée de valider l’éradication de la variole par vaccination. Trois ans après le dernier cas clinique observé en Somalie, Fenner peut déclarer devant l’assemblée générale de l’OMS le 8 mai 1980 que la variole est éradiquée, treize ans seulement après le lancement du programme de vaccination en masse.
À cette époque, Fenner s’est déjà orienté vers l’écologie, en particulier au centre d’études environnementales de l’Université nationale d’Australie à Canberra, institut qui porte aujourd’hui son nom. De plus en plus préoccupé par l’évolution environnementale qu'il constate et étudie, il devient si pessimiste qu’il avance peu avant sa mort, survenue le 22 novembre 2010, que l’espèce humaine devrait disparaître rapidement, « peut-être en l’espace d’un siècle ». Ces propos, venant d’un des scientifiques australiens les plus connus, ont été très largement commentés dans la presse mondiale.
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Écrit par
- Gabriel GACHELIN : chercheur en histoire des sciences, université Paris VII-Denis-Diderot, ancien chef de service à l'Institut Pasteur
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Média