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WRIGHT FRANK LLOYD (1867-1959)

« Bien que la Bible ait joué un rôle d'une importance incalculable dans la formation de la culture occidentale pendant deux millénaires, c'est seulement avec Wright que la pensée biblique est parvenue à s'exprimer dans l'architecture, dominée de façon à peu près totale par la tradition gréco-romaine. » Wright avait dans le sang le sens missionnaire de la protestation. Il cherchait « la vérité contre le monde ». Comme le fait observer Norris Kelly Smith, dans Frank Lloyd Wright : A Study in Architectural Content, il est le premier architecte à puiser directement dans la pensée hébraïque : il défend une conception de la vie dynamique, vigoureuse, passionnée et souvent explosive, antagoniste de la vision modérée, harmonieuse, olympienne, propre à la culture hellénique, et que l'aristotélisme chrétien a assimilée en fonction du pouvoir politique de l'Église.

Déchirure de la boîte architecturale

Frank Lloyd Wright est né à Richland Center, dans le Wisconsin ; son père était un pasteur baptiste, devenu ensuite « unitarien ».

Dès sa jeunesse, Wright est un rebelle : dans le cursus des architectes américains, même des plus indépendants comme Henry Hobson Richardson et Louis Sullivan, l'École des beaux-arts de Paris constituait une étape obligatoire ; lorsqu'on offre à Wright, en 1894, d'aller à Paris, sa réponse est un « non » tranchant. C'est qu'il a appris à détester le classicisme en observant à quelles tragiques conséquences il menait à l'exposition colombienne de Chicago en 1893 : une « White City » de style gréco-romain, une ville blanche comme les visages cadavériques de ses édifices de marbre. Élève de Sullivan, avec qui il avait travaillé pendant cinq ans, il veut, en architecture aussi, revenir aux sources bibliques, à la matrice, à la vérité originaire, et il en vient rapidement à l'identifier dans l'espace intérieur, défini comme l'élément dirigeant, le protagoniste de la réalité architecturale.

Le premier cycle de l'activité de Wright va de la Winslow House à River Forest dans l'Illinois (1893) jusqu'aux chefs-d'œuvre que sont la Robie House de Chicago, la Roberts House et la Coonley House de Riverside (1908-1909). C'est la période dite des Prairie Houses, qui témoigne d'une agression croissante contre le principe traditionnel de la boîte architecturale. La Winslow House se présente encore comme un prisme compact, avec symétrie de la façade. Mais déjà, en 1900, la Hickox House de Kankakee, dans l'Illinois, a rompu l'enveloppe pour projeter les volumes des différentes pièces dans le paysage. À Highland Park (Ill.), la Willitts House, qui est de 1902, offre un parti en croix, avec des bras qui partent de la cheminée et se prolongent en longs portiques assumant une fonction de liaison entre les lieux clos et la nature. Dans la Roberts House, la fluidité planimétrique est intégrée par la continuité verticale, grâce à un séjour qui relie deux niveaux. C'est toujours la ligne horizontale qui domine : elle est la « ligne de terre » immanente. Sous cet aspect aussi, Wright est biblique, et non pas chrétien : il mise sur la vie vécue, et non sur la vie éternelle, il considère le chemin de l'homme dans ce monde, et non celui de l'œil montant vers Dieu.

La période des Prairie Houses comprend divers bâtiments non résidentiels, parmi lesquels le Larkin Building à Buffalo (N. Y.), qui est de 1904, et le Unity Temple de Oak Park (Ill.), de 1906. Ils expriment l'idée wrightienne des structures insérées dans le milieu urbain, idée qui trouvera plus tard confirmation dans le Johnson Wax Building et dans le musée Guggenheim : l'attention créatrice est concentrée à l'intérieur, dans un grand creux illuminé par en haut et protégé des bruits de la ville par des murs solides.[...]

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Écrit par

  • : professeur d'histoire de l'architecture, auteur, président du Comité international des critiques d'architecture

Classification

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