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BRENTANO FRANZ (1838-1917)

Nature des phénomènes psychiques

Brentano définit la psychologie comme la science des phénomènes psychiques ; ceux-ci possèdent diverses caractéristiques.

Le phénomène psychique est une «  représentation » (Vorstellung) ou se fonde sur une représentation. Les actes psychiques les plus complexes (le jugement, le vouloir, les émotions) reposent en dernière analyse sur la représentation, acte le plus élémentaire de la conscience.

Il y a une dualité inhérente au phénomène psychique : dans la représentation, le jugement ou l'émotion, la conscience « s'oriente » vers un objet ou un état donné. Cette relation, Brentano, fidèle à l'usage scolastique, la nomme « rapport intentionnel » (intentionale Beziehung) ou «  intentionnalité ». Cette dualité est étrangère aux phénomènes physiques. La couleur ou le son ne s'orientent pas l'un vers l'autre, ils sont fermés en eux-mêmes. L'acte psychique (voir une couleur, entendre un son) porte en lui-même l'« intention » vers l'objet auquel il se réfère : la conscience se dépasse pour atteindre un objet « extérieur » à elle.

L'expression « rapport intentionnel » a été vulgarisée par Husserl et les phénoménologues, qui toutefois lui donnent un sens quelque peu différent.

D'après Brentano, les actes psychiques peuvent à leur tour devenir des objets intentionnels et servir de fondement à d'autres actes psychiques. Éprouve-t-on, par exemple, de la joie en écoutant un morceau de musique, la musique est l'objet intentionnel de l'acte d'écouter et celui-ci l'objet de la joie. La régression à l'infini est évitée car il ne s'agit que d'un seul phénomène (le son entendu et la joie éprouvée ne font qu'un) dans lequel on distingue, par abstraction, deux représentations orientées vers deux objets différents.

Le phénomène psychique n'est pas seulement « conscience de... », mais aussi « conscience de soi-même ». Celui qui entend un son a conscience de l'entendre, celui qui éprouve la douleur sait, par là même, qu'il l'éprouve. Cette conscience de soi est appelée par Brentano « conscience seconde » ou « perception intérieure ». À la lumière de cette conception, d'après laquelle tout acte psychique est une conscience évidente de soi-même, on peut comprendre que Brentano ait nié l'existence de phénomènes psychiques non conscients ; il critiqua, entre autres, la théorie d'Édouard von Hartmann exposée dans Philosophie de l'inconscient(Philosophie des Unbewussten, 1869).

La conscience a pour caractère essentiel l'« unité » : les phénomènes psychiques sont les parties d'un tout organique. La conscience de l'objet primaire – la couleur, le son – et celle de l'objet secondaire ne sont pas deux actes séparés mais les deux faces d'un phénomène unique. De même, la présence simultanée à la conscience de plusieurs phénomènes ne rompt pas son unité.

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