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FRANZ KAFKA (Cahier de l'Herne)

« Que serait Kafka “après son siècle” ? » se demandent Jean-Pierre Morel et Wolfgang Asholt, les maîtres d’œuvre du Cahier de L'Herne (2014) consacré à l’écrivain, faisant allusion au titre de l'exposition Le Siècle de Kafka conçue par Yasha David au Centre Georges-Pompidou en 1984. Pour le moment, « l'après-Kafka » n'a pas commencé. Nous vivons au rythme des commémorations de 1914 qui nous rappellent la terrible actualité de cette Grande Guerre que Karl Kraus a représentée comme « les derniers jours de l'humanité ». C'est justement au cours de cette année-là que Kafka entreprit d’écrire Le Procès.

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Réunissant les contributions d’un colloque qui se tint à Cerisy en 2010, J.-P. Morel et W. Asholt leur ont adjoint une chronologie détaillée de la vie et de l’œuvre, un choix de textes autobiographiques, ainsi qu’un ensemble de « résonances » qui, de Döblin à Sebald, de Gide et Blanchot à Philip Roth, ont marqué la réflexion sur Kafka. L’édition de l’œuvre, son interprétation et sa situation dans le contexte historique qui la vit apparaître (les relations de l’écrivain avec le judaïsme, sa lecture de Weininger, la présence des moyens de communication modernes…) constituent les grands axes de ce volume. Mentionnons également la partie « Écrire, mettre en scène et filmer Kafka », avec notamment une contribution de Jean Jourdheuil sur les adaptations de l’œuvre au théâtre.

Les passionnantes relectures de Dans la colonie pénitentiaire auxquelles nous invitent Pascale Casanova et Ritchie Robertson mettent à la torture le peu de bonne conscience qui reste à notre civilisation. La première suggère que, dans ce texte, Kafka dit la vérité de l'antisémitisme en se plaçant « du point de vue de ceux pour qui cette stigmatisation est éprouvée comme une évidence, une loi à laquelle il doit être obéi ». Robertson, pour sa part, compare le nouveau commandant qui tolère les anciennes pratiques de torture à celui d'Abou Ghraib, qui fermait les yeux sur les violences infligées à des prisonniers irakiens. La section consacrée à Dans la colonie pénitentiaire se conclut avec un texte saisissant de Heiner Müller qui modifie et prolonge librement le texte de Kafka.

Au début du volume l'écrivain et cinéaste Alexander Kluge, né huit ans après la mort de Kafka, en 1932, nous dit beaucoup de choses importantes, mais ce qu'il pense de la langue de Kafka est très surprenant. Il estime ainsi que le tchèque, l'allemand et même le russe sont « des langues [qui] manquent singulièrement de précision, mais [qui] sont très riches en connotations et gagnent en éclat lorsqu'on y mêle de la réflexion latine ».

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