FRAUDE SCIENTIFIQUE
L'effet « fraudogène » de la pression à la publication
Comment expliquer ce qui semble bien être sinon un développement de la fraude, du moins une détérioration de la rigueur scientifique facilitée par l'évolution technologique ? De l'avis général, la pression à la publication en est la première responsable. La recherche scientifique a de tout temps été une activité très compétitive. Le renom, les récompenses, la postérité vont au premier qui décrit un phénomène, qui formule une théorie. Mais l'intensité de cette concurrence n'a cessé de croître depuis les années 1990, sous la pression de trois phénomènes. Le premier est le développement de la science dans les pays émergents, et en particulier la Chine, qui est passée de la cinquième place mondiale (en nombre de publications annuelles) en 1991 à la deuxième. Le deuxième est la généralisation à l’échelle mondiale du système de financement de la recherche sur projet, qui était jusqu'aux années 1990 une spécificité nord-américaine. L'angoisse de ne plus obtenir de financement pour son laboratoire incite certainement les chercheurs à une moindre rigueur, voire à la fraude, pour obtenir au plus vite des résultats justifiant une nouvelle demande de financement. Le troisième est la sélectivité croissante des agences chargées de financer la recherche. En 1976, les National Institutes of Health (NIH), principales institutions de la recherche biomédicale aux États-Unis, finançaient 33 % des projets qui leur étaient soumis. En 2013, ils en finançaient 16 %, taux le plus faible de l'histoire de l'institution. Une évolution comparable s'observe avec l'Agence nationale de la recherche (ANR) en France : 26 % de réponses positives aux projets soumis l’année de la création de l'ANR, en 2005, 9 % en 2014.
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Écrit par
- Nicolas CHEVASSUS-au-LOUIS : docteur en biologie, journaliste
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Médias
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