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DARD FRÉDÉRIC (1921-2000)

Né à Jallieu (Isère) le 29 juin 1921, Frédéric Dard, peu enclin aux études, fait ses premières armes littéraires dans la revue Le Mois à Lyon. Ses publications ne tardent guère : La Peuchère, M. Joos (1941). Il se marie en 1942. Durant la guerre et l'après-guerre, Dard publie chroniques, articles, nouvelles ainsi que ses premiers « polars », très recherchés par les collectionneurs, parmi lesquels Réglez-lui son compte (1949), une espèce de « Peter Cheyney francisé », dont le héros est un certain commissaire San-Antonio, un nom repéré sur une carte des États-Unis.

À la fin de 1949, la famille Dard « monte » s'établir aux Mureaux. Par chance, le directeur des éditions Fleuve noir, ayant trouvé le premier San-Antonio chez un bouquiniste, contacte son auteur. La série commence avec Laissez tomber la fille (1950). En même temps, Dard publie d'autres romans (Dernière Mission, Du plomb pour ces demoiselles, N'ouvrez pas ce cercueil) sous divers pseudonymes ou sous son vrai nom. Mais la réussite se fait attendre.

Frédéric Dard est prêt à renoncer à l'écriture lorsque Simenon l'autorise à adapter au théâtre son roman La neige était sale, pièce qui fait un triomphe (1950). Le théâtre l'accapare un certain temps, sans parler de ses nombreux scénarios pour le cinéma ou la télévision. Toutefois, poussé par son éditeur, Dard se consacre de plus en plus aux San-Antonio. Le succès vient enfin, avec bientôt des centaines de milliers d'admirateurs, au rang desquels Jean Cocteau, qui traduit le sentiment général en lui écrivant : « J'achète un San-Antonio, je l'ouvre, et voilà votre cœur qui saute sur le mien ! »

En 1964 commence la publication des « hors-collection » avec L'Histoire de France vue par San-Antonio, qui atteint le million d'exemplaires. Frédéric Dard devient l'auteur « le plus lu des Français ». Surmené, il tente de se suicider en 1965, avant de refaire sa vie avec la fille de son éditeur, et de s'installer en Suisse romande. Là, il reprend son rythme d'écriture infernal, payé d'une égale réussite jusqu'à sa mort, à la veille de laquelle paraît le hors-collection Napoléon Pommier (2000), précédé, à la fin de 1999, du 174e roman de la série.

Il faut souligner la formidable popularité acquise par les héros de cette saga : San-Antonio lui-même, personnage éponyme aussi brillant que pathétique, chéri des dames, redouté de la pègre et couvé par sa mère Félicie ; Bérurier, truculent, bâfreur, paillard, musclé et roué, irremplaçable dans le cœur du public ; Pinaud, discret et subtil ; Marie-Marie, espiègle fillette devenue héroïne belle et troublante... Tous sont désormais inscrits à notre patrimoine littéraire.

Apposée sur des romans au ton très différent – tel le chef-d'œuvre À San Pedro ou ailleurs (1968) – la signature de Frédéric Dard disparaît dès 1979. Y a-t-il un Français dans la salle ? (1979), La vieille qui marchait dans la mer (1988) figurent ainsi parmi les textes marquants signés San-Antonio, bien que sans rapport avec les enquêtes du commissaire.

Au fil des ans, le regard porté sur cet auteur inclassable – et abondamment traduit malgré la difficulté de l'exercice – s'est affiné. En témoignent les nombreuses études qui lui ont été consacrées, sans oublier la réunion en volumes de ses Réflexions (1999-2000), véritable condensé de sa philosophie et de son esprit.

Dans la série San-Antonio, déployée sur toute la seconde moitié du xxe siècle, Frédéric Dard s'est livré avec de plus en plus d'impétuosité à un somptueux travail sur la langue, dévoilant un talent et une inventivité que la critique n'a parfois reconnus que du bout des lèvres. Le public, lui, ne s'y est jamais trompé. Dard a façonné le français à sa botte, produisant entre autres un vocabulaire savoureux,[...]

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  • POLICIER ROMAN

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    • 14 médias
    ...Paris. Si la saga ne fut jamais achevée (quinze arrondissements sur vingt furent visités), elle reste un étonnant témoignage sur le Paris des années 1950. Frédéric Dard commence en 1940 par publier des ouvrages sans rapport avec le genre policier, avant de signer, à partir de 1945, des romans noirs, durs...