FRÉDÉRIC II DE PRUSSE (1712-1786)
Le chef de guerre
Frédéric le Grand : l'hommage s'adresse aussi bien au « philosophe couronné » qu'au vainqueur de l'Autriche et de ses alliés. Et c'est sans doute par la résistance acharnée qu'il oppose aux coups de la fortune pendant six années (1757-1762), sans jamais succomber alors qu'on le croit perdu, que Frédéric mérite le mieux le surnom de grand.
Grand chef de guerre ? La question a été discutée. On a insisté sur ses erreurs initiales et son rôle peu brillant à Mollwitz, sur la préparation insuffisante et la mauvaise exécution des campagnes de 1742 et 1744. On a allégué, pour expliquer ses victoires, les fautes de ses ennemis, incapables de coordonner leurs opérations, la prudence excessive des généraux autrichiens, la médiocrité de Soubise. Tout cela est vrai. Il reste cependant que Frédéric a disposé d'un outil excellent, et surtout qu'il a su en tirer, en des circonstances difficiles, le meilleur parti.
L'outil, c'est l' armée prussienne. Frédéric-Guillaume Ier, le Roi-Sergent, l'avait portée de 45 000 à 76 000 hommes, chiffre énorme eu égard à la faible population (2,2 millions) de son royaume. Frédéric II va continuer l'œuvre entreprise : 195 000 soldats en 1786 pour 5,7 millions d'habitants. L'armée est composée d'étrangers recrutés dans toute l'Europe par racolage, suivant des procédés plus ou moins réguliers, et de nationaux astreints au service en vertu du « règlement par cantons » de 1733. Les cadres sont fournis par la noblesse, qui se met ainsi au service du roi. Cette armée, en temps de paix, est exercée durement et minutieusement, et la précision automatique de ses mouvements fait l'admiration de toute l'Europe. Mais, au combat, elle risque de se débander si la mort de ses chefs ou la rupture de l'ordre de bataille la prive de commandement.
Or Frédéric – sauf à Mollwitz, mais la leçon a porté – a toujours été à sa tête, au milieu des revers comme des succès. Pour lui, le but de la guerre est moins l'occupation ou la défense d'un territoire que l'écrasement des forces adverses ; il faut donc prendre l'offensive sur le sol ennemi, garder l'initiative de la manœuvre, livrer bataille en un point déterminé avec le maximum de ses forces : ces principes sont appliqués à Rossbach et surtout à Leuthen. Mais Frédéric n'est pas un doctrinaire ; réaliste, il s'adapte aux circonstances, sachant aussi bien ne pas s'abandonner après une défaite (Kunersdorf en 1759, la pire année de la guerre) que manœuvrer pour éviter la bataille (campagne de 1761). Plus encore que ses qualités intellectuelles, c'est le ressort moral qui caractérise Frédéric chef de guerre ; le stoïcisme lui donne la force de surmonter les revers et de ne pas céder dans l'adversité.
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Écrit par
- Michel EUDE : maître assistant à la faculté des lettres et sciences humaines de Rouen
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