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FREE JAZZ

Caractérisée par le retour à l'improvisation collective, cette « New Thing » est une expression esthétique qui correspond à une prise de conscience politique des musiciens afro-américains. Elle connaît son apogée dans les années 1960 grâce à Albert Ayler, Ornette Coleman et Cecil Taylor.

Ornette Coleman - crédits : Philippe Gras

Ornette Coleman

Le free jazz apparaît aux États-Unis au début des années 1960, dans un contexte politique agité (guerre du Vietnam) et à un moment où la contestation sociale grandit au sein de la communauté noire. Cette New Thing, traduction musicale de ce vent du changement, a pour projet de libérer la musique improvisée afro-américaine des schémas musicaux et sociaux établis. Si John Coltrane, le saxophone soprano au timbre déchiré, Charlie Mingus (Pithecanthropus Erectus, 1956), Cecil Taylor avec Steve Lacy (Jazz Advence, 1956) Art Blakey et son jeu de batterie non linéaire, ou même Roland Kirk (Rip, Rig and Panic, 1965) ont montré la voie de la déconstruction sonore, c'est Ornette Coleman à la tête d'un double quartette, qui enregistre Free Jazz>, en décembre 1960 ; Eric Dolphy participe à ce disque de rupture en forme de manifeste : les deux défricheurs font voler en éclats la notion de composition et les formes préétablies en choisissant l'improvisation totale comme processus de création. De nombreux créateurs – Archie Shepp, Pharoah Sanders, Sun Ra, l'Art Ensemble of Chicago, Albert Ayler ou Don Cherry – s'engouffrent dans cette brèche ouverte en contestant les caractéristiques formelles traditionnelles du jazz. Ainsi, la section* rythmique opère des ruptures en s'affranchissant de la pulsation linéaire comme du swing ternaire. Dans cet esprit, Cecil Taylor invente le « tempo subjectif ». L'improvisation sur une grille d'accords n'est plus systématique. On recherche de nouveaux timbres, on redécouvre le growl*, la production de sons inouïs par l'utilisation non académique des instruments et l'emploi de registres extrêmes. Le piano fait place à des instruments rares, voire exotiques, joués par des poly-instrumentistes. Ainsi, Pharoah Sanders> emploie des instruments africains tels que le balafon. Le processus de déconstruction passe également par la dilution du thème, l'éclatement du flux mélodique, un recours à des échappées atonales et une utilisation non conventionnelle des modes (Don Cherry et sa musique « primale »). À partir d'octobre 1964, les rencontres musicales organisées à New York au Cellar Cafe débouchent sur la création de la Jazz Composer's Guild Association, qui regroupe sur un mode coopératif des instrumentistes expérimentateurs autour de Bill Dixon. Un conseiller juridique, Bernard Stollman, fonde le label ESP, qui soutiendra des artistes comme Sunny Murray, Albert Ayler ou Milford Graves et son New York Art Quartet.

Cecil Taylor - crédits : Philippe Gras

Cecil Taylor

Pharoah Sanders - crédits : Philippe Gras

Pharoah Sanders

Les influences extérieures comme les musiques savantes contemporaines (approche bruitiste, clusters, processus aléatoires chers à John Cage) et les cultures extra-européennes seront explorées plus avant par des musiciens comme Michel Portal, Bernard Lubat, Joëlle Léandre, Anthony Braxton ou Steve Lacy.

Cette réactivité de l'Europe et, en particulier, de la France s'explique par l'exil, à partir de 1969, de nombreux jazzmen américains. Des musiciens free, comme Alan Silva, s'installent à Paris, attirés par la considération de la critique et les nombreuses possibilités qu'offre la scène parisienne. À la faveur de ces présences, le label BYG peut produire cette nouvelle musique qui séduit tant de musiciens français.

À partir de 1995, le free jazz revient avec le Vision Festival organisé à New York par William Parker et son label AUM Fidelity.

— Eugène LLEDO

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Écrit par

  • : compositeur, auteur, musicologue et designer sonore

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Médias

Ornette Coleman - crédits : Philippe Gras

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Cecil Taylor - crédits : Philippe Gras

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Pharoah Sanders - crédits : Philippe Gras

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