AUPHAN GABRIEL (1894-1982)
Né à Alès (Gard), le 4 novembre 1894, élève à l'École navale, Gabriel Auphan est capitaine de vaisseau en 1936 et commande la Jeanne d'Arc, croiseur-école de la Marine nationale. Sous-chef d'état-major en 1939, après avoir appartenu aux cabinets des ministres de la Marine Georges Leygues et François Pietri en 1928 et 1934, il est nommé directeur du cabinet de l'amiral Darlan, secrétaire d'État à la Marine du gouvernement de Vichy.
Contre-amiral depuis le 19 juin 1940, Gabriel Auphan est, sous l'État français, l'une des figures représentatives du « clan des techniciens » qui compte, dès 1940, dix-huit des trente-cinq ministres du maréchal Pétain. Il sera lui-même membre du gouvernement Laval en qualité de secrétaire d'État à la Marine, d'avril à novembre 1942. Au côté de l'amiral Darlan ou dans le cabinet Laval, l'amiral Auphan porta sa part de responsabilité dans les actes du gouvernement de Vichy. Mais il ne partagea pas la conviction de Darlan selon laquelle « le salut de la France se trouvait dans la collaboration avec l'Allemagne », ni le souhait de Pierre Laval d'une victoire du IIIe Reich.
Proche du maréchal Pétain, il chercha à lui faire quitter la France au moment de l'occupation de la zone libre. Ses efforts étant restés vains, il démissionna du gouvernement, le 17 novembre 1942, ce qui devait lui faire plaider son absence de responsabilité dans le sabordage de la flotte réalisé à Toulon, sous l'autorité de l'amiral de Laborde, dix jours plus tard.
Mais, si l'amiral Auphan fut le seul à quitter le gouvernement à l'automne de 1942 avec un autre ministre technicien, Robert Gibrat, ingénieur des Mines et secrétaire d'État aux Communications, il ne voulut pas rejoindre la France combattante qui restait pour lui la « dissidence » et l'alliée de la Grande-Bretagne considérée comme l'adversaire traditionnel par la Marine nationale, dont l'anglophobie fut renforcée par les événements de Mers el-Kébir.
Sa fidélité au maréchal Pétain valut à Gabriel Auphan d'être chargé d'une mission deconfiance, le 11 août 1944. Il fut en effet habilité à négocier avec le gouvernement provisoire de la République française, qui avait été proclamé à Alger le 3 juin 1944. Son ordre de mission le chargeait : « de prendre, éventuellement, contact [...] avec le général de Gaulle, à l'effet de trouver au problème politique français, au moment de la libération du territoire, une solution de nature à empêcher la guerre civile et à réconcilier tous les Français de bonne foi ». Le chef de l'État français avait ajouté qu'il faisait confiance à l'amiral Auphan « pour agir au mieux des intérêts de la Patrie », mais il demandait que fût sauvegardé le « principe de légitimité » dont il estimait toujours être l'incarnation.
Mais, de même que le général de Gaulle avait fait mettre en garde contre toute idée de réunir l'ancienne Assemblée nationale, ses délégués dans Paris occupé ainsi que le commissaire de la République en Auvergne veillaient à ce qu'il n'y eût aucune légitimation de la France combattante par l'État français. La démarche de Gabriel Auphan, faite par l'entremise du général Juin, ne reçut donc que le silence pour toute réponse. En outre, l'amiral réussit à n'avoir, le 20 août 1944, qu'un seul participant sur les six qu'aurait dû comporter son « conseil de régence » chargé d'assurer collégialement les fonctions du chef de l'État en cas d'empêchement de ce dernier.
Dans ses Mémoires de guerre (2 : L'Unité), Charles de Gaulle a rappelé cet épisode : « En l'espèce, le sentiment ne saurait compter en face de la raison d'État [... en matière de justice], nul arrangement n'est imaginable [...]. La[...]
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Écrit par
- Charles-Louis FOULON : docteur en études politiques et en histoire, ancien délégué-adjoint aux célébrations nationales (ministère de la Culture et de la Communication)
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