GARCÍA MÁRQUEZ GABRIEL (1927-2014)
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Littérature et politique
La politique est toujours présente chez García Márquez, soit par la fréquente référence au conflit historique entre libéralisme et conservatisme, soit par la critique implicite des rapports sociaux fondés sur l'oppression. Cependant, L'Automne du patriarche et Le Général dans son labyrinthe (Elgeneral en su laberinto, 1989) sont des romans de thème explicitement politique.
En ce qui concerne le premier, la relation avec la réalité est cette fois-ci immédiate, puisque c'est dans sa propre expérience des régimes dictatoriaux que l'auteur a puisé une grande partie de son inspiration. Toutefois, le « patriarche » saisi dans son « automne » n'est situé ni dans une époque ni dans un pays précis : le sujet du livre, c'est le pouvoir dictatorial en soi, plus exactement le « caudillisme » qui marque la vie politique du monde ibéro-américain. Là encore, si García Márquez se sert de matériaux tirés d'une réalité reconnaissable, c'est pour aussitôt les élaborer en une image symbolique du pouvoir arbitraire quel qu'il soit. Plutôt que la réalité, il vise en fait la vérité du personnage, ce qui lui permet de donner libre cours à son sens de la caricature. Ce parti pris de transposition se signale d'ailleurs par une maîtrise technique encore en progrès : le ton imperturbable et le rythme égal qui caractérisent la manière de García Márquez s'appliquent ici à une phrase longue et enveloppante, d'une extraordinaire richesse suggestive.
La création romanesque de García Márquez semble une fois de plus se définir dans le refus systématique d'un réalisme traditionnel qui donnerait au discours narratif un caractère platement analytique. D'où l'ambiguïté déjà signalée et à laquelle n'échappe pas Le Général dans son labyrinthe, roman qui évoque les derniers jours de la vie du théoricien et fondateur de l'Amérique latine indépendante, Simón Bolívar. Dans ses récits politiques, comme dans le reste de son œuvre, les moyens esthétiques mis en œuvre par García Márquez n'ont pas pour but la manifestation d'une idéologie explicite (comme celle qui apparaît dans son abondante œuvre journalistique). Son attitude de romancier est avant tout éthique, une éthique qui semble se fonder sur un mélange d'humanisme et de scepticisme, et qui demeure toujours profondément ouverte.
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Écrit par
- Jean-Pierre RESSOT : ancien maître de conférences, université de Paris-IV-Sorbonne, U.F.R. de langue et littérature espagnoles
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