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MIRÓ GABRIEL (1879-1930)

Les portraits

Plus qu'à l'élaboration romanesque, plus qu'au déroulement même du récit, Miró s'attache surtout au décor qu'il évoque et aux personnages qu'il met en action. On sent que les êtres humains intéressent passionnément l'écrivain ; il sait les regarder, les observer, saisir au vol un geste, une attitude, un trait de leur physionomie, tout ce qui les révèle ou les trahit ; il sait, en quelques mots, en dessiner d'étonnants portraits, souvent empreints d'ironie ou de tendresse. Voici par exemple l'image d'un prêtre généreux : « Un ventre imposant que celui de don Magín, un ventre et un thorax unis en une courbe de loyauté et d'arrogance ; un cou laiteux, d'enfant ; la tête robuste, aux traits sculptés ; le nez charnu, la mâchoire solide, la bouche grassouillette avec une moue et un gloussement de gourmandise, les yeux dorés et fidèles, et le front inondé de soleil, car il portait toujours son chapeau de peluche rejeté sur la nuque. » Toute une foule d'ecclésiastiques, de prélats, de chapelains, de religieux ou de simples dévots peuplent les pages de Miró qui les dépeint sans monotonie. Les caractères féminins ont aussi beaucoup de douceur, ou bien un relief saisissant, comme ce portrait d'une vieille fille : « Ses cheveux ondulés au fer à friser recouvraient quelque peu son front osseux et vaste comme celui de son frère ; des yeux avec des reflets bleus de phosphore humide ; sa mantille, lourde, posée avec des minauderies et une malice qui lui donnaient une expression dévote et sensuelle. Tout son visage, dur et plâtré de blanc, s'animait sous la rouge vibration de la langue qui ne cessait de rafraîchir ses lèvres. » S'il fallait résumer en quelques mots l'art du portrait selon Miró, on pourrait dire de lui qu'il a su voir les hommes avec autant d'humour que de compassion, avec autant d'amour que de pénétration. C'est dire que dans ses portraits, c'est tout le cœur humain qui se dévoile. Comme dans la nature, Miró sait lire dans les visages.

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Écrit par

  • : professeur émérite des Universités, membre correspondant de la Real Academia Española

Classification

Autres références

  • DUPIN JACQUES (1927-2012)

    • Écrit par
    • 749 mots

    Poète et critique d'art né à Privas (Ardèche), Jacques Dupin partageait avec quelques-unes des voix poétiques majeures de sa génération – Yves Bonnefoy, André du Bouchet avec lesquels il fonda en 1967 la revue L'Éphémère – le souci de rendre l'expérience poétique à sa vocation...