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GIRAUD GAËL (1970- )

Pensée économique

Ses premiers travaux sur la théorie des jeux ne le prédisposaient pourtant pas à la critique des modèles libéraux. Mais, s’appuyant sur sa connaissance de la science économique « mainstream », Gaël Giraud rompt avec les fondements mathématiques néoclassiques. Il défend la nécessité d’un pluralisme méthodologique peu présent dans les modèles dominants qui font confiance à « l’efficience des marchés ».

Dans cet esprit, il codirige en 2009 un ouvrage collectif qui a fait date : Vingt propositions pour réformer le capitalisme. L’ouvrage rassemble des praticiens des marchés financiers, des cadres d’entreprise, des universitaires, des spécialistes de l’éthique, qui veulent remettre l’économie au service de la société et ouvrir le débat sur les moyens d’améliorer la gouvernance mondiale. C’est ce qu’on appellera la recherche d’un « équilibre soutenable à long terme entre les impératifs sociaux, écologiques et politiques ».

Le profil « décalé » de Gaël Giraud ne pouvait qu’intéresser l’Agence française de développement (AFD) qui en fait son chef économiste de 2015 à 2019. Dans ce cadre, il poursuit son travail sur la thématique des biens communs, sur la question du partage des richesses, sur la recherche de mesures alternatives de développement, etc.

Avec la publication en 2012 dIllusion financière, Gaël Giraud commence à toucher un public plus large, notamment parmi les lycéens. Il remonte aux origines des discours et des institutions qui ont entretenu la « mythologie » de l’efficacité du capitalisme financier, il en explique la démesure et les dérives et analyse l’impasse économique dans laquelle elle plonge les États.

Gaël Giraud ne condamne pas les banques, mais cherche un modèle qui réconcilie leurs activités avec l’organisation d’un développement durable respectueux de la planète et de l’humanité. L’une de ses propositions phares est l’annulation de la part de la dette publique des États membres de la zone euro se trouvant au bilan de la Banque centrale européenne (BCE), annulation dont il soutient qu’elle est non seulement possible techniquement, mais qu’elle est conforme au droit européen – le refus d’annuler cette dette relevant, selon Giraud, d’un choix politique de la part des décideurs. Les États européens, qui s’étaient reconstruits après la Seconde Guerre mondiale grâce à des crédits publics massifs, pourraient ainsi bénéficier de l’effacement des dettes publiques détenues par la BCE (environ 2 500 milliards d’euros), tout en s’engageant à investir les mêmes montants dans la reconstruction écologique et sociale.

Ces propositions audacieuses, à rebours de la doxa économique, nourrissent le débat public. En février 2021, aux côtés de près de 150 autres économistes, Gaël Giraud signe un appel diffusé dans les grands médias européens : « Annuler les dettes publiques détenues par la BCE pour reprendre en main notre destin. »Bien sûr, si un certain nombre d’économistes adhèrent à cette thèse, la majorité d‘entre eux rejettent ce point de vue et continuent de considérer la croissance et la redistribution des surplus qu’elle produit aux plus pauvres comme les meilleurs outils de la lutte contre les inégalités. Cependant, l’idée d’une relance verte financée par l’annulation des dettes souveraines nées de la crise sanitaire liée à la Covid-19 séduit de nombreux sympathisants de l’écologie politique et de l’économie sociale et solidaire.

— Françoise PICHON-MAMÈRE

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Média

Gaël Giraud - crédits : Mathieu Genon/ Opale/ Bridgeman Images

Gaël Giraud