GALICE
L'art baroque
Ce type d'homme trouva son meilleur représentant en José de Vega y Verdugo, comte de Alba Real, aristocrate raffiné, passionné d'architecture, qui connaissait personnellement l'Italie. Placé à la tête de la fabrique en 1658, il conçut un plan d'ensemble pour transformer la cathédrale, jugée « indécente » à cause de sa vétusté. Il exposa ses idées dans un précieux rapport, ou Informe, sur diverses œuvres à réaliser dans la cathédrale et il utilisa le concours de José de la Peña de Toro, un architecte formé à Salamanque dans le goût classique, mais qui évolua vers le baroque sous son influence.
On entreprit donc de dissimuler l'édifice ancien derrière une série de constructions plaquées contre ses flancs et mises en valeur par de vastes esplanades ; mais l'essentiel de l'œuvre fut réalisé par les successeurs de Peña de Toro : Domingo Antonio de Andrade et Fernando Casas y Nóvoa. Le premier de ces maîtres fut un des principaux architectes de l'époque, à la fois créateur de structures et inventeur d'un répertoire décoratif, comme l'a montré Antonio Bonet Correa. Il éleva le portique de la Quintana, sur la façade orientale du bras sud du transept, et la tour de l'Horloge qui la couronne : un monument insigne, qui fut aussi souvent imité en Galice que la Giralda de Séville en Andalousie. Quant à Casas y Nóvoa, il intervint d'une manière décisive dans la construction de la façade occidentale de la cathédrale, dite de l'Obradoiro, en dressant en avant du chef-d'œuvre de maître Mathieu un immense écran vitré, appuyé sur de puissants supports : l'Espejo.
Ces transformations extérieures de la cathédrale furent le prélude à une modification de tout l'espace urbain suivant l'esprit pittoresque et théâtral du baroque. Il s'agissait de multiplier les points de vue agréables et de fournir un cadre plaisant aux fêtes religieuses et profanes qui accompagnaient le culte de l'apôtre. Rarement l'esprit baroque a aussi fortement marqué une ville.
Le développement architectural gagna la Galice entière, grâce à l'action des ordres religieux. Dans un pays appauvri par la ruine de l'industrie et du commerce, les moines constituaient une minorité fortunée, en raison de la possession d'immenses domaines qu'ils géraient avec efficacité depuis la réforme ecclésiastique des Rois Catholiques et la suppression de la commende. Durant deux siècles, c'est-à-dire jusqu'aux environs de 1760, époque où la crise économique s'approfondit dans les campagnes, les moines bénédictins et cisterciens reconstruisirent leurs monastères en leur donnant des proportions grandioses pour en faire les symboles de leur puissance, en adoptant des programmes où fusionnèrent et se métamorphosèrent en fonction des conditions locales les différents styles issus de la Renaissance.
Généralement, les moines, et principalement les bénédictins, manifestèrent une certaine réserve à l'égard du baroque et de ses fantaisies. À Santiago même, le grand monastère de San Martín Pinario, tout proche de la cathédrale, sembla organiser la résistance au baroque avec Bartolomé Fernández Lechuga, maître de l'œuvre en 1627, qui dessina le grand cloître, et avec le frère Gabriel de Las Casas, auteur de la majestueuse façade (1697-1738). Dans les campagnes, même si les cloîtres de San Esteban de Ribas de Sil et l'église de Montederramo prolongent jusqu'au début du xviie siècle le courant puriste issu de Monforte de Lemos, on assiste généralement à une transposition des formes classiques pour tenir compte du matériau local : ce fut le cas pour la façade de l'église d'Osera, achevée en 1637, et pour celle de l'église de Monfero, datant des environs de 1645. L'esprit classique demeure vivant jusqu'au début du [...]
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Écrit par
- Roland COURTOT : agrégé de l'Université, maître assistant à l'Institut de géographie d'Aix-Marseille
- Marcel DURLIAT : professeur émérite d'histoire de l'art à l'université de Toulouse-Le-Mirail
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