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GASSENDI PIERRE GASSEND dit (1592-1655)

Savant et philosophe français, né près de Digne, reçu docteur en théologie en 1614 à Avignon, Gassendi est ordonné prêtre en 1616 et enseigne la philosophie à l'université d'Aix-en-Provence de 1617 à 1623. Il y fait des observations astronomiques détaillées, se déclare partisan de Copernic et entre en correspondance avec Galilée. Il partage ensuite son temps entre Digne, où il est depuis 1626 prévôt de la cathédrale, et Paris, où il se lie d'amitié avec le monde savant et où il enseigne les mathématiques au Collège royal de 1645 à 1648.

On peut voir d'abord en Gassendi le critique d'Aristote et de Descartes. En 1624, il publie les Exercitationes paradoxicae adversus Aristoteleos (Dissertations en forme de paradoxes contre les aristotéliciens, trad. B. Rochot, Paris, 1959). Sous l'influence de Sextus Empiricus, de Montaigne, de Pierre Charron, et à la recherche d'une voie moyenne entre scepticisme et dogmatisme, il lance une attaque contre Aristote, puis en général contre tous ceux qui prétendent avoir découvert un savoir nécessaire et indubitable de la nature réelle des choses. Pour lui, tout le savoir provient de l'expérience sensible ; il est impossible de parvenir à des principes premiers entièrement vrais ni à des définitions véritablement essentielles. L'induction ne peut fournir de propositions universelles. Cependant, si nous ne connaissons que les apparences des choses, du moins pouvons-nous élaborer un savoir utile de ces apparences. Gassendi rejoint ainsi Mersenne et le courant de pensée que l'on a pu qualifier de phénoménaliste et de pragmatiste avant la lettre. En 1641, à la demande de Mersenne, il écrit ses Objections aux Méditations de Descartes, répertoriées comme étant les Cinquièmes Objections et développées, après réception des Réponses, dans la Disquisitio metaphysica, publiée à Amsterdam en 1644 (Recherches métaphysiques, trad. B. Rochot, Paris, 1962). Certaines remarques ne manquent pas d'humour (ainsi à propos de la Seconde Méditation : « Vous n'aviez pas besoin d'un si grand appareil pour prouver que vous êtes »), ni de sens commun (« Vous ne pouvez pas douter sérieusement des choses extérieures dont l'existence nous est révélée par nos sens, car vous marchez sur la terre ») ; enfin, sa conception des rapports entre l'animalité et l'humanité nous paraît plus moderne et plus sensée que l'aberrante conception cartésienne des « animaux machines » : « Le chien reconnaît son maître aux mêmes signes que nous reconnaissons des hommes sous des chapeaux et des manteaux [...] c'est un même acte d'imagination. » Gassendi s'efforce de montrer que l'usage méthodique du doute par Descartes n'ajoute rien à ce que proclamaient depuis des siècles les sceptiques ; il estime que la « clarté » et la « distinction » des idées sont des critères insuffisants de la vérité. Il émet enfin l'hypothèse que toute science, même claire et distincte, ne concerne peut-être rien qui soit effectivement extérieur à l'esprit. Descartes ressentit vivement cette attaque et n'y trouva d'autre réplique que celle-ci : « Si cela est vrai, contentons-nous d'être des singes et des perroquets. »

La pensée de Gassendi se caractérise par la recherche, au moyen de l'atomisme, d'une « voie moyenne » entre les dogmatiques, qui surestiment les capacités de l'esprit humain, et les sceptiques, qui surestiment les obstacles au savoir. Gassendi considère qu'il est au pouvoir de l'homme de bâtir une science intéressante et utile du monde des apparences. Il se sert, à titre de modèle hypothétique, de l'atomisme épicurien qu'il a longuement étudié, en humaniste classique, et sur lequel il a publié trois ouvrages en latin en 1647 et 1649 (B. Rochot, [...]

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Écrit par

  • : agrégée de l'Université, docteur en philosophie, maître de conférences à l'université de Rennes

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