RAMON GASTON (1886-1963)
Après des études secondaires au lycée de Sens, Gaston Ramon entre à l'École vétérinaire d'Alfort. Là, il s'intéresse moins à la médecine vétérinaire qu'au travail de laboratoire. Le professeur Vallée, chargé de l'enseignement de la microbiologie, le recommande, à la fin de sa scolarité, à Émile Roux, alors directeur de l'Institut Pasteur. En 1911, il devient l'auxiliaire du vétérinaire Prévot à l'annexe de l'Institut Pasteur située à Garches (Hauts-de-Seine), et il s'occupe des chevaux servant à la préparation des sérums thérapeutiques. Pendant quinze ans, il assurera effectivement cette tâche, particulièrement lourde pendant la Première Guerre mondiale.
Cependant, au lendemain de la guerre, il éprouve plus intensément encore le goût de la recherche. Mais il ne dispose d'aucun laboratoire, et son maître Prévot se refuse à encourager sa vocation. Bref, il est seul. Cependant, Ramon a à sa disposition des toxines microbiennes et les antitoxines contenues dans les sérums thérapeutiques, ainsi que quelques tubes et pipettes. C'est assez pour qu'il soit conduit à quatre découvertes fondamentales : la réaction de floculation (1922), les vaccins antidiphtérique et antitétanique connus sous le nom d'anatoxines (1923), les vaccinations associées et le principe de ce qu'on appelle aujourd'hui l'immunostimulation (1926).
La réaction de floculation avait l'avantage de rendre beaucoup plus facile, dans certains cas, le titrage des antigènes et des anticorps. Encore aujourd'hui, elle demeure d'un emploi universel pour le titrage de l'antitoxine diphtérique.
Les vaccins de Pasteur (et aussi tous ceux qui avaient été mis au point secondairement) étaient constitués par des bactéries et des virus soit vivants mais atténués, soit tués. Ramon, sous le nom d'anatoxines, crée un type de vaccin absolument nouveau. Une anatoxine est une toxine microbienne qui a perdu son pouvoir toxique sous l'effet combiné du formol et de la chaleur, mais qui a conservé intact son pouvoir vaccinant. Ramon mit au point plusieurs anatoxines dont les deux plus célèbres demeurent les anatoxines diphtérique et tétanique. Grâce à un emploi très étendu de la première, on a pu assister à la quasi-disparition d'une maladie qui, encore au xxe siècle, était responsable de beaucoup de morts. L'emploi de l'anatoxine tétanique n'a pas eu un effet aussi radical sur le tétanos, car, trop souvent, les sujets vaccinés une fois oublient de se soumettre à des injections de rappel. Pour cette raison, la sensibilité de la toxine tétanique réapparaît chez l'adulte et le vieillard.
L'immunostimulation est la possibilité d'activer le système immunitaire (dans le cas où il n'est pas affecté de défauts constitutifs) en injectant, chez l'animal ou chez l'homme, certains bacilles tués ou encore des extraits de ces bacilles. L'effet obtenu en ce cas est non spécifique et de courte durée, mais il peut être utile.
La dernière partie de la vie de Ramon fut surtout consacrée à l'administration. De 1926 à 1944, il dirigea l'Institut Pasteur de Garches, après avoir été aussi, de 1934 à 1940, sous-directeur puis directeur de l'Institut Pasteur de Paris. Ultérieurement, il devait diriger l'Office des épizooties à Paris.
Membre de nombreuses académies, et grand-croix de la Légion d'honneur, Ramon s'était fixé deux buts : assurer la pérennité de son œuvre (moins par orgueil que par volonté de servir), ajouter plus de prestige encore à cette maison de Pasteur qui fut la sienne pendant quarante ans, et dont il reste une des plus belles figures.
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Écrit par
- Albert DELAUNAY : chef de service honoraire à l'Institut Pasteur
Classification
Média
Autres références
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BOIVIN ANDRÉ (1895-1949)
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Biochimiste et bactériologiste français qui fut l'un des meilleurs immunologistes de son temps. Né à Auxerre (Bourgogne), dans un milieu très modeste, il avait d'abord songé à être instituteur, mais les hasards de la Première Guerre mondiale, en faisant de lui un infirmier militaire dans un hôpital...
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