GAULE
Les acquis de la recherche archéologique
La période gauloise est assurément celle de l'histoire de France sur laquelle courent le plus de clichés. Les manuels scolaires nous décrivent des sociétés villageoises rudimentaires, qui n'auraient connu la civilisation que grâce à la conquête militaire romaine, une vision primitiviste, sinon coloniale, que la bande dessinée, même au second degré, a contribué à renforcer. Les Gaulois ont été régulièrement l'objet de récupérations politiques, depuis Napoléon III jusqu'au régime de Vichy ou même aux extrêmes droites contemporaines. Enfin la vogue des Celtes encourage une littérature new age ésotérique, prétendant s'appuyer sur des vestiges archéologiques qui sont pourtant antérieurs de plusieurs millénaires, s'agissant des dolmens et des menhirs, à la période gauloise.
Une archéologie très récente
Ces approximations ou contresens historiques ont longtemps tenu à l'absence de fouilles archéologiques systématiques. Les archéologues professionnels fouillaient les sites prestigieux de Grèce, d'Italie ou d'Orient, négligeant ceux de la métropole, laissés aux seuls archéologues bénévoles, dépourvus de moyens. Aussi, pendant des décennies, des milliers de sites ont été irrémédiablement détruits par les grands travaux d'aménagement, avant que peu à peu une archéologie préventive enfin digne de ce nom ne se mette en place, avec la loi de 2001 et la création de l'Institut national de recherches archéologiques préventives (I.N.R.A.P.). Ce sont ces fouilles préventives, liées aux aménagements (autoroutes, T.G.V., zones industrielles, constructions, carrières, etc.) qui ont entièrement renouvelé sinon bouleversé, en vingt ans, notre connaissance des Gaulois. Ces fouilles ont permis d'étudier des terroirs sur des centaines d'hectares, de retrouver le plan complet de grandes fermes gauloises ainsi que leur organisation et leur implantation dans le paysage – comme dans la banlieue d'Arras, les vallées de l'Oise et de l'Aisne, ou encore sur l'autoroute A19 (Loiret).
De grands chantiers de fouille permanents ont aussi pu être mis en place en dehors de toute menace de destruction, comme celui de Lattes près de Montpellier, du mont Beuvray (l'antique Bibracte, capitale des Éduens) près d'Autun, de la ferme aristocratique de Paule dans les Côtes-d'Armor, ou encore de l'habitat fortifié du Mont-Lassois en Côte-d'Or, entre autres. Enfin, le progrès des méthodes de l'archéologie apporte des informations fondamentales sur l'agriculture, l'élevage, l'alimentation, l'origine et la circulation des matières premières, les techniques, le climat et l'environnement.
Les sociétés gauloises, loin d'avoir été immobiles, ont d'abord une longue histoire. Celles qui occupaient l'actuel territoire français appartenaient à l'ensemble dit « celtique » qui, au moins d'un point de vue linguistique, s'est sans doute formé vers la fin du IIIe millénaire avant notre ère sur une partie de l'Europe du Nord-Ouest, qui s'étend de la Bohême aux îles Britanniques. Mais on ne parle vraiment de Celtes et de Gaulois qu'à partir de l'Âge du fer, environ 800 ans avant notre ère. Ces sociétés connaissent une première période de concentration politique au cours du vie siècle avant notre ère, avec un réseau de places fortes, comme celle du Mont-Lassois, dont les élites se faisaient inhumer dans des tombes somptueuses – celle de Vix étant la plus célèbre. Ce système s'effondre pourtant vers — 500, amenant un retour à des communautés villageoises plus modestes. Vers — 400, une partie d'entre elles, dans une période de dégradation climatique, migrent vers l'Europe du Sud (c'est le fameux siège de Rome par Brennus) et jusqu'en Turquie, avant d'être partiellement[...]
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Écrit par
- Jean-Paul DEMOULE : professeur émérite à l'université Paris-I-Panthéon-Sorbonne et à l'Institut universitaire de France
- Jean-Jacques HATT : archéologue, professeur à la faculté des lettres de Strasbourg
Classification
Médias
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