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GAULLE-ANTHONIOZ GENEVIÈVE DE (1920-2002)

Déportée à Ravensbrück, première femme élevée à la dignité de grand-croix de la Légion d'honneur pour avoir, toute sa vie, « lutté contre l'humiliation », Geneviève de Gaulle a consacré plus de quarante ans aux actions humanitaires. Présidente de l'association ATD Quart-Monde, elle se battit contre la précarité avec l'énergie des survivantes des camps nazis.

Née le 25 octobre 1920, orpheline de mère à quatre ans, la fille de Xavier de Gaulle, frère aîné du général de Gaulle, s'était engagée dans le mouvement Défense de la France parce que, voyant sa patrie menacée de disparaître, elle avait découvert « qu'on pouvait donner sa vie pour la défendre ». Arrêtée le 20 juillet 1943, déportée à Ravensbrück où elle arrive le 3 février 1944, elle attendit plus de cinquante ans pour relater sa terrible expérience du système nazi dans La Traversée de la nuit (1998). Elle y dénonce la haine et la violence pires que la mort, une détresse inhumaine et cet objectif majeur des bourreaux : la destruction progressive de ce qui constitue un être humain, sa dignité, sa relation avec les autres, ses droits les plus élémentaires ; elle y raconte ce qui l'a sauvée : le partage de la fraternité et du pain, la tendresse de regards amis et son transfert à l'infirmerie en octobre 1944.

Mariée en 1946 à l'éditeur d'art Bernard Anthonioz, qui sera, en 1962, chef du service de la création artistique au ministère des Affaires culturelles, Geneviève de Gaulle a aussi été membre du cabinet d'André Malraux en 1958 ; elle y défendit le développement de la recherche scientifique. Si elle renonça à ses tâches officielles pour assister le père Joseph Wresinski, qui venait de fonder, en 1957, l'association Aide à toute détresse, ATD (qu'il renommera, quelques années plus tard, ATD Quart-Monde), elle garda la certitude que « la culture est un vrai chemin pour sortir de la grande pauvreté et vaincre l'exclusion ».

Présidente de 1964 à 1998 de la section française d'ATD Quart-Monde, elle voyait dans tous les arts « des chemins de rencontre entre les familles les plus pauvres, leurs enfants et les autres familles, les autres enfants ». Le 20 décembre 1999, elle salua la réunion à l'U.N.E.S.C.O. d'un sommet européen de l'éducation artistique, demandant que celle-ci « soit accessible prioritairement à celles et ceux qui en sont les plus éloignés ».

Cette gaulliste de gauche, mère de quatre enfants, s'était réjouie de la création du revenu minimum d'insertion sous le gouvernement de Michel Rocard (en septembre 1988). Rapporteur du Conseil économique et social sur la lutte contre la grande pauvreté, elle eut part au succès que fut l'adoption, en juillet 1998, de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions ; l'article Ier reflétait sa pensée : « La lutte contre les exclusions est un impératif national fondé sur le respect de l'égale dignité de tous les êtres humains [...] ». Après ce vote, elle fut remplacée à la présidence d'ATD, dont elle resta la figure de proue ; c'est dans une coédition de l'association, Le Secret de l'espérance (2001), qu'elle réaffirma, six mois avant sa mort, la nécessité d'une lutte permanente contre la misère.

Médaillée de la Résistance avec rosette depuis le 31 mars 1947, présidente de l'Association nationale des anciennes déportées et internées de la Résistance à partir de 1956, le matricule F-27372 consacra beaucoup de temps à la mémoire de ses camarades. Pour le trentième anniversaire de la libération des camps, le 10 mai 1975, elle suscita la venue d'André Malraux à Chartres pour évoquer « le fond de la misère humaine » et les « volontaires d'une atroce agonie » méritant de recevoir « le sacre du courage ». Dans [...]

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Écrit par

  • : docteur en études politiques et en histoire, ancien délégué-adjoint aux célébrations nationales (ministère de la Culture et de la Communication)

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