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GÉOCENTRISME

Cosmologie et physique

Dans l'Almageste se mêlent trois composantes bien distinctes. D'abord, une vision globale du monde : une cosmologie. Ensuite, un outil mathématique, essentiellement la trigonométrie, au service de la résolution des triangles plans et sphériques. Enfin, une astronomie pratique, en l'occurrence un ensemble de modèles géométriques, de tableaux de nombres et de règles calculatoires, véritables « recettes de cuisine » permettant de situer à un moment donné les astres vagabonds – le Soleil, la Lune et les planètes – sur le quadrillage apparemment immuable des étoiles fixes.

Si la trigonométrie et la pratique astronomique peuvent se permettre d'être innocentes, il n'en saurait être de même de la cosmologie. Une cosmologie suppose une philosophie de la nature, ou, pour le moins, une physique. La cosmologie de Ptolémée est tributaire d'une physique, vieille déjà de cinq siècles, celle d'Aristote. Physique fausse à nos yeux, certes, et en particulier dynamique fausse, où les forces sont proportionnelles aux vitesses (alors qu'elles sont proportionnelles aux accélérations), mais physique du bon sens, d'un certain vécu, et au service de laquelle Aristote avait mis sa redoutable logique.

C'est par la théorie du mouvement que, chez Aristote, cosmologie et physique sont intimement liées. Parler de cosmos, c'est d'abord affirmer que le monde a une structure, une forme et un ordre, et ce sont cette structure, cette forme et cet ordre que la cosmologie apporte à la physique. En retour, la physique apporte à la cosmologie la garantie de la stabilité de l'ordre du monde, tout en s'attaquant au délicat problème du changement. La physique aristotélicienne élaborera les notions philosophiques et les principes de base qui rendent le mouvement possible et qui satisfont aux données immédiates de l'expérience et aux exigences de la raison. Car, au temps d'Aristote, les philosophes n'ont toujours pas répondu aux défis des Éléates.

Parménide - Élée (Italie) - crédits : DeAgostini/ Getty Images

Parménide - Élée (Italie)

À écouter Parménide (vie-ve siècle av. J.-C.), en effet, on ne peut que refuser l'expérience vécue et que dénoncer les phénomènes comme illusoires. Au chapitre viii du livre I de sa Physique, Aristote résume ainsi les arguments de Parménide : « Nul être n'est engendré, ni détruit, parce que ce qui est engendré doit l'être nécessairement de l'être ou du non-être, deux solutions également impossibles : en effet, l'être ne peut être engendré, car il existait déjà, et rien ne peut être engendré du non-être car il faut quelque chose comme sujet. » En d'autres termes, ce qui n'est pas ne peut pas commencer d'être, ce qui est reste identique à soi-même éternellement, s'il devenait autre, quelque chose, qui n'était pas, commencerait d'être. Autant dire que la physique est science sans objet.

Le mouvement, dont Aristote ne fera qu'une catégorie du changement, n'est pas possible non plus ! Les paradoxes de Zénon d'Élée (ve siècle av. J.-C.) ne sont pas plus facilement contournables que ceux de Parménide : le coureur ne touchera jamais au but, car avant de toucher l'extrémité de la piste, il aura dû toucher sa moitié et, encore avant, la moitié de sa moitié... Achille ne rattrapera pas plus la tortue. Car le temps qu'il ait rattrapé sa position première, la tortue aura avancé, et le temps qu'il ait rattrapé sa deuxième position, elle aura de nouveau avancé...

Or, pour Aristote, l'expérience sensible nous impose l'évidence de la réalité du changement et du mouvement et, puisque, en son temps, ces problèmes sont liés à ceux de l'être et du non-être, c'est-à-dire ressortissent à l'ontologie, il commencera par élaborer les notions d'être en acte et d'être en puissance : distinction par laquelle il introduit[...]

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Ptolémée, Juste de Gand - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Ptolémée, Juste de Gand

Platon - Athènes - crédits : AKG-images

Platon - Athènes

Parménide - Élée (Italie) - crédits : DeAgostini/ Getty Images

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