GÉODÉSIE

Science très ancienne, la géodésie a eu longtemps pour objet l'étude de la forme de la Terre et la mesure de ses dimensions. La mise sur orbite des premiers satellites artificiels autour de la Terre, dans le milieu des années 1960, a marqué le début d'une transformation radicale de cette discipline. En effet, grâce à la multiplicité des capteurs embarqués et aux performances sans cesse accrues des systèmes spatiaux, la Terre est aujourd'hui « mesurée » de loin, de façon globale et permanente, avec une précision saisissante. Les phénomènes observés par la géodésie spatiale sont étonnamment variés. Ils concernent :

– le champ de pesanteur, dont les variations géographiques résultent de la répartition hétérogène de la matière à l'intérieur du globe terrestre et, en particulier, des courants convectifs qui animent le manteau ;

– la cartographie – avec une résolution kilométrique – des reliefs sous-marins, dont les grands traits sont associés aux frontières des plaques tectoniques ;

– des mouvements divers, comme ceux actuels des plaques tectoniques, les déformations de la croûte terrestre dans les régions sismiques, les déformations associées aux éruptions volcaniques, les mouvements verticaux de la croûte terrestre (par exemple l'élévation des montagnes, la subsidence du sol due à l'exploitation pétrolière ou encore la surrection des régions nordiques causée par la fonte des calottes glaciaires de la dernière grande glaciation), la mesure des pulsations à grande échelle du globe solide et des océans dues à l'attraction de la Lune et du Soleil (marées terrestres et océaniques) ;

– les fluctuations de la vitesse de rotation de la Terre sur elle-même et les oscillations de son axe de rotation ;

– les variations temporelles du champ de pesanteur résultant de redistributions de masses d'air ou d'eau entre l'atmosphère, les océans et les réservoirs hydrologiques continentaux ;

– les mouvements du centre de masse de la Terre.

Le caractère planétaire des observations, leur continuité temporelle (plusieurs années, voire une à deux décennies aujourd'hui), leur précision exceptionnelle (millimétrique ou centimétrique pour les déformations, de 1 à 2 mm/an pour les mouvements lents) apportent des informations de premier ordre sur les phénomènes dynamiques qui agissent tant au sein de la planète qu'à sa surface.

La géodésie s'appuie aujourd'hui sur un ensemble de techniques qui utilisent principalement les satellites artificiels. Au carrefour de plusieurs disciplines (la géophysique interne, la mécanique céleste, l'océanographie, la glaciologie, la climatologie), la géodésie aborde l'étude de la planète Terre comme un corps céleste déformable, en rotation, réagissant à l'action de forces externes et internes.

Historique

Avec l'astronomie et les mathématiques, la géodésie est une des sciences les plus anciennes. La rotondité de la Terre était considérée comme établie par les scientifiques et les philosophes grecs de l'époque classique, et c'est à Ératosthène, géomètre grec du iii^e siècle avant J.-C., que l'on doit les premières tentatives de mesure des dimensions du globe terrestre. Pendant des siècles, les travaux des géodésiens eurent pour objectif la détermination du rayon de la Terre par la mesure de la longueur d'un arc de méridien. En 1668, une expédition géodésique fut organisée par la nouvelle Académie des sciences de Paris. Son but était de mesurer un arc de méridien terrestre avec une précision jamais atteinte auparavant. L'abbé Picard, astronome, fut chargé de cette détermination dont les résultats furent décisifs. Ils permirent notamment à Newton d'énoncer la loi de l'attraction universelle. Dans ses Principes de philosophie naturelle, publiés en[...]