BAUQUIER GEORGES (1910-1997)
Le nom de Georges Bauquier est associé à l'œuvre de Fernand Léger. Mais il ne faut méconnaître ni sa carrière de peintre ni son engagement politique. Né en 1910 à Aigues-Mortes, il entre dans l'atelier de Léger en 1936 et il en devient le massier (le trésorier), sensible, comme Léger et certains élèves, à l'orientation sociale du Front populaire qui arrive au pouvoir cette année-là. Sous l'Occupation, il rejoint la Résistance et, en 1946, en vue du retour prochain de Léger de son exil aux États-Unis pendant la guerre, il assure, avec Nadia Khodossievitch, l'assistante de Léger, la réouverture de l'atelier dont il est alors le directeur. En 1950, il expose à la galerie Bernheim Jeune au lendemain de la présentation des tableaux de l'artiste communiste André Fougeron, rassemblés sous le titre Le Pays des mines, et dans une même veine réaliste. En 1951, le tableau de Georges Bauquier Les Dockers est un soutien explicite à un jeune second maître de la marine, Henri Martin, qui a tenté par un sabotage d'empêcher le départ d'un bateau de troupes vers l'Indochine : l'œuvre est retirée du Salon d'automne par la police. Georges Bauquier continue à exposer chez Bernheim, ou à la galerie Louis Carré en 1953 et en 1955. Puis il s'écarte de ce nouveau réalisme, comme se dénomme elle-même cette version française du réalisme socialiste, et il se consacre à ce qui sera désormais sa voie, des peintures qui confèrent aux objets quotidiens, aux iris des jardins ou aux paysages du Var, une vie silencieuse mais intense dans une lumière méridionale aux couleurs chaudes. Une rétrospective lui rendra hommage en 1992 dans le musée qu'il va créer en l'honneur de Fernand Léger.
En effet, à partir de 1958, c'est-à-dire trois ans après la mort de Fernand Léger, Georges Bauquier se consacre avec la veuve de l'artiste, Nadia Léger, à l'édification d'un musée dédié à Fernand Léger. Musée qui allait être construit sur le terrain que Léger avait acheté quelques jours avant sa mort à Biot, près d'Antibes, pour y bâtir un atelier consacré à la céramique non loin de son ancien élève, le céramiste Roland Brice. Le musée, orné d'un large fronton en céramique que Léger avait conçu pour un stade, est inauguré en 1960 par Gaétan Picon, directeur des Arts et Lettres. En 1967, les deux mécènes font don à l'État français du musée et des œuvres qui y sont exposées (44 peintures, 67 gouaches, 114 dessins, 136 lithographies de Léger). C'est André Malraux, ministre de la Culture, qui vient à Biot recevoir la donation. Jusqu'en 1993, date à laquelle il remet l'administration et la gestion entières de l'établissement à l'État, Georges Bauquier demeurant le directeur du musée, qu'il finance largement : en 1990 il fait construire une extension qui double la surface du bâtiment et permet d'ouvrir des salles d'expositions temporaires. Une partie des revenus est fournie par la vente de compositions en céramique ou en mosaïque – réalisées à partir de gouaches ou de peintures de Léger – qui témoignent de l'intérêt que Léger porta à ces techniques à la fin de sa vie.
Parallèlement, Georges Bauquier rassemble une énorme documentation sur l'œuvre de Léger et il s'attache à constituer, en collaboration avec Nelly Maillard, le catalogue raisonné de l'œuvre peint. Lorsque le premier volume paraît aux éditions Adrien Maeght en 1990, l'ensemble de l'ouvrage est pratiquement achevé et Georges Bauquier a pu voir la publication de cinq volumes sur les dix prévus. Il est aussi l'auteur d'une monographie vivante et personnelle de l'artiste auquel il a voué sa vie, Fernand Léger, vivre dans le vrai, parue en 1987 chez Adrien Maeght.
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Écrit par
- Hélène LASSALLE : conservateur en chef du Patrimoine honoraire
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