BRASSENS GEORGES (1921-1981)
Les trompettes de la renommée
En quelques mois, Brassens réussit à capter l'attention de la presse et du public. En février 1953, neuf disques 78-tours sont déjà parus. À la fin de l'année, il passe en vedette à Bobino, le célèbre music-hall parisien de la rive gauche. Malgré ce foudroyant succès, qui ne se démentira jamais, la radio nationale ne diffuse jamais ses chansons, interdites par le comité d'écoute. C'est seulement en 1955, avec la création d'Europe no 1, que celles-ci peuvent enfin passer sur les ondes.
Brassens est pourtant le poète que la France s'est choisi. Les uns réprouvent ses mots grossiers et son anarchisme alors que les autres se réjouissent des volées de bois vert qu'il distribue allègrement à l'Église, à la police et aux bourgeois ; mais tous se réconcilient grâce à la Chanson pour l'Auvergnat, Les Copains d'abord ou la Supplique pour être enterré sur une plage de Sète.
Les succès s'enchaînent. Brassens met en musique quelques poèmes : la Ballade des dames du temps jadis de François Villon, Il n'y a pas d'amour heureux de Louis Aragon, Gastibelza de Victor Hugo, La Marine de Paul Fort, Les Passantes d'Antoine Pol... Mais ce sont ses propres textes qui lui ouvrent les portes de la postérité. Son écriture utilise des formes linguistiques classiques, parfois désuètes (« callypige » dans Vénus callipyge, « vergogne » dans Les Quatre Bacheliers ou Hécatombe...), elle use de références culturelles souvent issues de chansons populaires (Dans l'eau de la claire fontaine, Les Sabots d'Hélène...). Brassens se fait maître dans l'art de détourner les expressions toutes faites, les lieux communs : « J'ai l'honneur de ne pas te demander ta main » (La Non-Demande en mariage), « Les femmes adultères d'abord ! » (À l'ombre des maris), « Dans ma gueule de bois j'ai tourné sept fois ma langue... » (Le Vin)...
Le public le sacre poète de la chanson. Avant lui, aucun chanteur n'avait accédé à ce statut. Les professeurs de français font volontiers écouter certaines de ses chansons à leurs élèves, tandis que des milliers de jeunes apprennent la guitare dans son sillage. Une tradition persistante voudrait que la musique de Brassens soit monotone, voire monocorde. Si le choix du dépouillement de l'accompagnement peut donner cette impression, il est indiscutable que les mélodies de Brassens constituent l'un des atouts majeurs de son succès. Influencé par les chansons napolitaines maternelles et les succès populaires des années 1930, Brassens a su composer des refrains mémorisables sur des harmonies extrêmement savantes que peu de guitaristes arrivent à reproduire aisément.
Brassens meurt à Saint-Gély-du-Fesc, près de Montpellier, le 29 octobre 1981. En moins de trente ans de carrière, il a donné une nouvelle identité à la chanson française et, sans le vouloir, a créé une école. De Jacques Brel à Cali en passant par Pierre Perret, Renaud, Maxime Le Forestier, Alain Souchon, Francis Cabrel, nombreux sont ceux qui le vénèrent et se réfèrent à son œuvre, à son attitude et à ses engagements.
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Écrit par
- Alain POULANGES : auteur
Classification
Média
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