HAUSSMANN GEORGES EUGÈNE baron (1809-1891)
La part personnelle de Haussmann dans les Grands Travaux
Quel rôle Georges Eugène Haussmann a-t-il joué pour que l’on parle d’« hausmannisme » et d’« haussmanisation », dès 1868 ? Bien qu’il ait reconnu la part de Napoléon III dans l’ouverture de voies nouvelles (plus de 70), il a revendiqué la paternité des Grands Travaux, et cela même quand leur financement a été remis en cause par « Les comptes fantastiques d’Haussmann », titre d’un article de Jules Ferry publié en 1868 dans le journal Le Temps, et quand il a été remercié en 1870.
Au sens strict et juridique du terme, le préfet est chargé des enquêtes d’utilité publique pour les expropriations préalables aux percements. La décision de décréter l’ouverture d’une voie nouvelle revient au ministre de l’Intérieur. Mais il est deux domaines dans lesquels Haussmann a excellé, du moins initialement : le financement des travaux et la réorganisation des services municipaux. Sous la préfecture de Rambuteau et de Berger, dans les années 1840, le principe était de ne dépenser pour les travaux que l’excédent budgétaire. Selon l’idée initiale des « dépenses productives » formulée par Persigny, Haussmann a décidé que cet excédent ne servirait qu’à couvrir les intérêts d’emprunts qui seraient remboursés par la plus-value des terrains désenclavés par les percées. Haussmann a donc imaginé successivement trois systèmes : l’emprunt (75 millions de francs en 1855, 140 en 1860, 250 en 1865), la vente de bons de la Caisse des travaux de Paris servant à l’achat de terrains et les « bons de délégation » (servant à subventionner les entrepreneurs concessionnaires). La Ville finance le remboursement de ses emprunts réels par des emprunts déguisés ; c’est le système dénoncé par Jules Ferry.
Haussmann découvre à la tête des services techniques de la Ville des ingénieurs en chef des Ponts-et-Chaussées à son avis peu compétents, et surtout insuffisamment soumis à ses ordres. Il choisit de mettre en place des services provisoirement parallèles, confiés à des ingénieurs en lesquels il a confiance, qu’il a connus dans ses préfectures successives, comme Eugène Belgrand (dans l’Yonne) ou Adolphe Alphand (à Bordeaux). Belgrand créera un système d’alimentation en eau de source de la capitale, captée dans la Vanne et la Dhuys et conduite par des aqueducs à la romaine. Il mettra également en place un chantier d'assainissement aboutissant à l’établissement d’un réseau moderne d’égout. Alphand a supervisé le système végétal haussmannien. Quantitativement, on n’aura jamais autant planté d’arbres, semé de pelouses, aménagé de parcs et de jardins dans Paris : deux « bois » (de Boulogne et de Vincennes), trois « parcs » (Monceau, les Buttes Chaumont et Montsouris), deux jardins, dix-neuf squares, d’innombrables places et avenues plantées, dont notamment l’avenue Foch, le boulevard Richard-Lenoir ou l’avenue de l’Observatoire.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Pierre PINON : professeur honoraire à l'École nationale supérieure d'architecture de Paris-Belleville
Classification
Autres références
-
MÉMOIRES (Baron Haussmann)
- Écrit par Bernard VALADE
- 1 075 mots
Pour ou contre Haussmann ? Préfet de la Seine de juin 1853 à janvier 1870, Haussmann fut-il un bienfaiteur, le bâtisseur du Paris moderne, l'inventeur d'un urbanisme opérationnel ou « l'éventreur » de la capitale, en zélé serviteur de Napoléon III ? À ces questions est ordonné un débat que plusieurs...
-
ALPHAND ADOLPHE (1817-1891)
- Écrit par Encyclopædia Universalis et Michel VERNÈS
- 1 674 mots
Ouvrir de nouveaux espaces, assainir les anciens, créer des jardins, embellir l'ensemble, tels sont les différents gestes d'une même démarche qui ont conduit à faire de Paris une capitale moderne au xixe siècle. Jean-Charles Adolphe Alphand, paysagiste et administrateur français de...
-
ARCHITECTURE (Thèmes généraux) - Architecture et société
- Écrit par Antoine PICON
- 5 782 mots
...de l'art se rallient plutôt à l'idée d'un aménagement plus rationnel des villes et des campagnes, un aménagement qui donnerait à chacun ses chances. En France, l'haussmannisation, qui veut assainir la ville, l'adapter aux flux de la société moderne, est contemporaine d'un ensemble de réflexions et d'expérimentations... -
DAVIOUD GABRIEL (1824-1881)
- Écrit par Jean-Pierre MOUILLESEAUX
- 122 mots
Entré au service de la ville de Paris après un début de formation à l'École des beaux-arts, Gabriel Davioud devient un architecte fonctionnaire associé activement aux chantiers du préfet Haussmann. Pour Paris, il multiplie les fontaines, les squares, dirige les travaux des promenades et des parcs...
-
EMPIRE SECOND (1852-1870)
- Écrit par Stella ROLLET
- 12 843 mots
- 9 médias
...grandes villes de province ‒ est souvent résumée au phénomène dit de l’haussmannisation. Si cette expression a le mérite de mettre en valeur le rôle réel du baron Eugène Haussmann, préfet de la Seine de juin 1853 aux premiers jours de 1870, elle passe en revanche sous silence le fait que les transformations... - Afficher les 10 références