DANTON GEORGES JACQUES (1759-1794)
Tribun populaire, Danton est une des figures majeures de la Révolution française. Ministre de la Justice au moment de la chute de la royauté, il a été ensuite le premier président du Comité de salut public, avant d’être éliminé par Robespierre, en raison de son opposition au régime de la Terreur. Sa personnalité est complexe et il faut dissocier deux questions trop souvent emmêlées : celle de la vénalité de Danton, celle de la portée et du sens de son action politique. Sur sa vénalité, le débat semble tranché. Bon vivant, jouisseur et truculent, Danton n'appartient pas à la race des révolutionnaires puritains, vertueux jusqu'au scrupule ; il n'a rien de l'incorruptible et, par là, ne cesse de séduire ou d'indigner ceux qui s'inquiètent des rapports de l'éthos révolutionnaire avec la « morale ». Mais, si Danton ne refusait guère les cadeaux, il est difficile de prouver qu'il en ait jamais tenu compte pour déterminer sa politique : toujours acheté, jamais vendu ! « Un homme comme moi est impayable », disait-il.
Le tribun populaire
Né à Arcis-sur-Aube, avocat au Conseil du roi, Danton ne joue aucun rôle dominant avant le 10 août 1792. Il est d'abord une notabilité de quartier, mis en vedette comme président du district des Cordeliers ; il se fait remarquer ensuite par sa fougueuse éloquence (« le Mirabeau de la populace ») au club des Jacobins (et non au club des Cordeliers, qu'il fréquentera fort peu). Déjà se marque en lui le contraste qui le caractérise : à écouter parler ce tonitruant patriote, on le prend pour le plus violent des extrémistes ; à réfléchir sur ce qu'il a proposé, on le reconnaît pour un manœuvrier prudent et souple. Lors de la crise de Varennes, il soutient habilement aux Jacobins l'idée d'une régence orléaniste ; après la fusillade du Champ-de-Mars, il se dérobe aux poursuites en quittant Paris. Danton reparaît sous la Législative comme substitut du procureur de la Commune de Paris (6 déc. 1791). Aux Jacobins, il soutient Robespierre (sans s'engager à fond) contre Brissot sur la question de la guerre ; puis, la guerre déclarée, il dénonce, comme Robespierre (avec plus d'éclats de voix), les carences et les trahisons des pouvoirs publics. Au soir de la journée du 10 août (qu'il n'a guère préparée : il est rentré la veille au soir d'un séjour dans son pays natal), le voici ministre de la Justice.
Dans ces quarante jours qui créèrent la République, de la prise des Tuileries à Valmy et la réunion de la Convention, Danton va mériter toutes les admirations qui s'égareraient sur les autres moments de sa carrière. Seul, dans un conseil des ministres dominé par Roland et les Girondins, il impose la résistance à l'offensive prussienne et le refus d'abandonner Paris ; seul, devant une Assemblée pusillanime et toujours royaliste en secret, il défend les initiatives de la Commune insurrectionnelle de Paris ; il seconde cette dernière dans les mesures de surveillance et de défense de la capitale ; il envoie des commissaires dans les départements pour impulser partout les mesures civiques et les préparatifs militaires. Pas plus que les autres dirigeants, il ne fait rien pour empêcher les massacres de septembre, mais il intervient pour empêcher l'arrestation de personnalités compromises. La postérité a surtout conservé un grand souvenir de ses harangues galvanisatrices (« De l'audace, encore de l'audace, toujours de l'audace ! ») ; c'est pourtant par des actes plus que par des phrases que, dans ces jours critiques, Danton a bien mérité de la patrie en danger. Audace, bien sûr, mais aussi sang-froid et habileté manœuvrière : c'est grâce à ses agents doubles qu'il entrave le déclenchement d'une première rébellion vendéenne, et avec ses émissaires qu'il achève de démoraliser le haut état-major prussien après Valmy.[...]
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- Jean MASSIN : écrivain
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