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THILL GEORGES (1897-1984)

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Peu de chanteurs, peu de musiciens ont eu auprès d'un aussi vaste public une popularité aussi durable. Le charme de celui que l'on peut appeler, sans craindre d'être démenti, le plus grand ténor français s'étend bien au-delà du cercle restreint des amateurs de belles voix. Georges Thill a tout pour séduire : le timbre, la sensibilité, un physique de jeune premier. Une carrière musicale d'une durée étonnante (largement consacrée pendant trente ans à la France – parisienne, provinciale et coloniale), une discographie exceptionnelle, un éclectisme naturel qui lui permet de passer avec aisance de l'opéra à la chanson et au cinéma, une vie brillante pleine de jolies femmes et de voitures rapides, en fallait-il davantage pour faire de Georges Thill, mieux qu'une star, un mythe ?

L’héritier de De Luca

Georges Gabriel Thill naît à Paris le 14 décembre 1897. Il trouve, en 1915, un premier emploi... à la Bourse des valeurs de Paris ! Très tôt, on remarque ses dispositions naturelles pour la musique, mais il n'a d'autres professeurs que les disques qu'il écoute : « J'ai appris à chanter par mimétisme. » De 1916 à 1918, il participe à la Grande Guerre, comme fantassin à Verdun et au Chemin des Dames, puis comme aviateur. C'est aux armées qu'il commence à chanter en public. En novembre 1918, il entre au Conservatoire de Paris et travaille le chant avec la basse André Gresse. Il y passe deux années qui ne seront couronnées, en 1920, que par un deuxième accessit de déclamation lyrique... « Je n'ai rien appris au Conservatoire, sauf le solfège ! » Georges Thill connaît alors de sérieux problèmes vocaux et souffre notamment d'une grande instabilité dans le grave et le médium.

Sur les conseils de l'un de ses camarades, le ténor Mario Podesta, il décide de prendre des leçons auprès de Fernando De Lucia à Naples. Certes, il sera auditionné par l'illustre baryton Mattia Battistini, il travaillera plus tard avec Franco Pandolfini dans l'étude du style et avec le baryton basse Pierre Dupré, mais aucun autre que le maître italien ne peut se vanter d'avoir forgé la voix et le style du grand ténor français. Toute sa vie, Georges Thill demeurera fidèle à l'enseignement de Fernando De Lucia. Cet ancien violoncelliste, créateur du rôle d’Osaka d'Iris de Pietro Mascagni en 1898 et rival de Caruso, le forme de 1921 à 1923, date à laquelle la maladie l'empêche de poursuivre son œuvre. Véritable Pygmalion, il va révéler Georges Thill à lui-même et au monde entier. Avec une patience d'alchimiste et une intelligence rare, Fernando De Lucia fait travailler la clarté d'émission, allège les sonorités, assouplit la ligne de chant. Grâce à lui, son aigu gagne en largeur et en éclat, son médium se colore, son grave retrouve une ampleur sonore insoupçonnée. La voix a maintenant conquis une parfaite homogénéité sur toute l'étendue de la tessiture, le métal brut s'est transformé en fin travail d'orfèvrerie.

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Dès 1924, Jacques Rouché auditionne Georges Thill et l'engage à l'Opéra de Paris. Il y débute le 24 février de la même année, dans Nicias de Thaïs de Massenet ; il y incarne ensuite les rôles-titres de Faust de Gounod et de Rigoletto de Verdi. Jusqu'en 1928, il se produit essentiellement au Palais-Garnier, dont il devient l'indiscutable vedette. Il y triomphe aussi bien dans Alceste de Gluck (Admetus), Le Jardin du paradis d'Alfred Bruneau (le Prince Assur), dans la pièce sacrée Mors et Vita de Gounod que dans le répertoire habituel de l'époque : Hérodiade (Jean) et Werther (rôle-titre) de Massenet, Mârouf de Henri Rabaud (rôle-titre), La Traviata (Alfred) et Aïda (Radamès) de Verdi, Paillasse de Leoncavallo (Canio), Roméo et Juliette de Gounod (Roméo)... En 1926, il aborde pour la première fois Wagner, avec le rôle-titre de Lohengrin, dont il sera l'une des plus parfaites incarnations. En 1928, il est invité au Covent Garden de Londres, où il chante Samson et Dalila de Saint-Saëns (Samson), sous la direction de Thomas Beecham. Le 29 mars de la même année, il participe à la création parisienne, en français, de Turandot de Puccini (Calaf). En 1929, il se distingue dans Carmen de Bizet (Don José) et dans Les Troyens de Berlioz (Énée) avant de s'envoler pour Buenos Aires, où il triomphe au Teatro Colón. La Scala l'appelle en 1930 pour Puccini (Turandot, Dick Johnson de La Fanciulla del West) et Umberto Giordano (rôle-titre de Andrea Chénier) ; son répertoire s'élargit à Don Carlos de Verdi et à Tannhäuser de Wagner (rôles-titres). Le Metropolitan Opera de New York l'engage en 1931 dans Gounod (Roméo et Juliette et Faust) et Verdi (Aïda, sous la direction de Tullio Serafin) ; en 1932, il chante à la Staatsoper de Vienne. En 1933, il est, au Palais-Garnier, un Parsifal de rêve en compagnie de Germaine Lubin et s'illustre dans les Maîtres chanteurs de Nuremberg de Wagner (Walther von Stolzing).

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