DEBREU GÉRARD (1921-2004)
Disparu le 31 décembre 2004, Gérard Debreu fut le premier économiste français à recevoir le prix Nobel, en 1983, pour ses travaux sur la théorie de l'équilibre général, cinq ans avant celui qui fut son maître dans la discipline, Maurice Allais.
Issu d'une famille d'industriels fabriquant de la dentelle, il est né le 4 juillet 1921 à Calais, où il commence ses études secondaires. Il les termine aux lycées d'Ambert (Puy-de-Dôme) et de Grenoble et, dès l'âge de vingt ans, il est admis à l'École normale supérieure à Paris. Il intègre très vite le groupe Nicolas Bourbaki, pseudonyme collectif de jeunes professeurs passionnés de mathématiques.
En 1944, formé dans une école d'officiers en Algérie, le jeune homme abandonne quelque temps ses études pour s'engager dans les Forces françaises libres et servir, après le débarquement des Alliés en Normandie en 1944, dans l'armée d'occupation de l'Allemagne vaincue. Il obtient son agrégation de mathématiques pendant l'hiver de 1946, et devient attaché de recherche au Centre national de la recherche scientifique (C.N.R.S.). Il y rencontre Maurice Allais qui l'initie à la théorie de l'équilibre général, et se tourne vers l'économie après avoir lu l'ouvrage de son maître, À la recherche d'une discipline économique (1943). À la suite d'un tirage au sort entre son ancien condisciple à Normale Marcel Boiteux, futur président d'E.D.F. et lui-même, il décroche une bourse de recherche de la fondation américaine Rockefeller et part étudier pendant deux ans (1948-1950) dans les plus prestigieuses universités : Harvard, Berkeley, Chicago, Columbia, Uppsala (Suède) et Oslo (Norvège).
Gérard Debreu émigre aux États-Unis en 1950 et obtient un poste de chercheur (1950-1955) à la Cowles Commission for Research in Economics, l'un des plus fameux laboratoires de recherche de l'université de Chicago. Alors qu'il est professeur associé à Yale (1955-1961), il revient en France en juin 1956 pour soutenir un doctorat de mathématiques et appliquer toute la rigueur de cette discipline à la théorie de l'offre et de la demande, dans la lignée des premières formalisations de Léon Walras et de Vilfredo Pareto.
Lorsqu'en 1959 il publie aux États-Unis sa thèse de doctorat, sous le titre Théorie de la valeur, les spécialistes, admiratifs, considèrent qu'il s'agit là de la formulation la plus accomplie de la théorie de l'équilibre général. Ces travaux ont prouvé qu'il est possible d'atteindre, avec des prix et des salaires flexibles et à l'issue d'un processus de tâtonnement, une situation dans laquelle tous les marchés d'une économie sont en équilibre, jusqu'à permettre une allocation optimale des ressources.
Travaillant en étroite collaboration avec Kenneth Arrow (Prix Nobel d'économie en 1972), Gérard Debreu montre qu'il est également possible de sélectionner parmi les équilibres celui qui maximise le bien-être collectif d'une société.
Aujourd'hui encore, sa démonstration est au fondement de nombreuses études d'économie théorique et appliquée. Cependant, la très grande abstraction de ses travaux et la complexité des techniques mathématiques utilisées rendent difficile l'accès à son œuvre.
En 1962, fort de sa double formation, il obtient une chaire de professeur d'économie à l'université de Californie à Berkeley, au moment où celle-ci constitue une équipe de très haut niveau à l'avant-garde de la recherche mondiale en matière de « modèles mathématiques formels en économie ». Gérard Debreu développe d'autres approches théoriques, notamment une théorie du capital et une étude du comportement économique en relation avec le degré d'incertitude des choix. À partir de 1975, il poursuit sa carrière à Berkeley comme professeur de[...]
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Écrit par
- Françoise PICHON-MAMÈRE : maître de conférences, université Paris-Sorbonne
Classification
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