GAROUSTE GÉRARD (1946- )
Parcours singulier que celui de Gérard Garouste, né à Paris en 1946. Peintre avant tout, mais aussi sculpteur et graveur, il se situe hors des courants et des modes artistiques par un travail souvent en décalage avec les pratiques artistiques dominantes, mais dont la puissance sémantique et formelle est aujourd'hui enfin reconnue. Si l'originalité de l'œuvre de Garouste a pu se détacher dès 1979 sur un fond de luttes avant-gardistes dont les problématiques tournaient autour de l'abstraction, du conceptuel, du travail in situ, ou encore de l'engagement sociopolitique, cela est dû non seulement à son opiniâtre production de peintre figuratif, mais aussi à un travail personnel et unique qui ne recherche pas pour eux-mêmes la nouveauté et l'inédit. Par ses enjeux plastiques, par ses significations esthétiques, son œuvre tient à la fois du classique, du moderne et du contemporain.
Après des études à l'École nationale supérieure des beaux-arts à Paris (1965-1972), Gérard Garouste expose assez rapidement, pour la première fois, à la galerie Zunini (Paris), mais il se tourne aussitôt vers la décoration de théâtre, abandonnant ainsi officiellement la peinture pendant dix ans. Parallèlement, il écrit et interprète une pièce, dont il réalise également les décors, Le Classique et l'Indien (1977), dont les thèmes et certains traits stylistiques reviendront souvent tout au long de son œuvre. Sa deuxième exposition personnelle, Comédie policière, à la galerie Travers (Paris), en 1979, marque sa véritable entrée dans le milieu de l'art. Prolongeant ce travail sur les jeux, les symboles et les énigmes, les œuvres qui suivront – La Règle du jeu, Cerbère et le Masque ou La Neuvième Combinaison (1979 et 1980) – se présentent comme des tableaux comprenant diverses saynètes, des tableaux matériellement séparés, mais liés narrativement, ou encore des sculptures-objets comprenant seize arrangements ou, plutôt, seize combinaisons possibles. Dans ces œuvres apparaissent déjà des références à de nombreux textes littéraires (profanes, mythologiques, religieux) ou encore à la peinture de la Renaissance ou du xviie siècle – tel Orion le Classique, Orion l'Indien (1981-1982, Musée national d'art moderne, Paris) ou Sainte Thérèse d'Avila (1983, F.R.A.C. Limousin) – qui demeurent encore ses sources d'inspiration.
Les toiles réalisées à partir de 1986 marquent un tournant stylistique en ceci qu'elles tendent – mais toujours en représentant des personnages humains ou animaux, des formes végétales, des maisons – vers ce que l'on peut appeler une « abstractisation » des figures. Sur d'immenses plages de couleurs chaudes et vives, celles-ci se détachent comme des êtres à la fois impalpables et étrangement présents, effet à la fois optique et tactile rendu par le méticuleux travail sur la matière picturale. Ces figures, dont les formes élancées ressemblent à ses sculptures, sont encore plus épurées dans les Indiennes, œuvres de grand format réalisées en 1988 (pouvant atteindre 3 m en hauteur et 5 m en largeur), jusqu'à devenir parfois, au début des années 1990, de simples entités graphiques dont les couleurs et les contours se confondent avec les parties purement picturales de la toile. Depuis 1991, Garouste est revenu à des personnages plus figuratifs pour, paradoxalement, mieux encore en déformer et en distordre les corps, les mélanger à des objets ou à des végétaux, créant ainsi des êtres hybrides qui errent en quête d'une réalité perdue, comme dans les œuvres réunies à la galerie Durand-Dessert, à Paris, pour l'exposition Tal, la rosée (1995-1996). Ces œuvres étonnantes renouent avec la tradition picturale de l'Occident en même temps qu'elles sont un parfait miroir de notre époque. Ce travail autour de la tradition se manifeste aussi[...]
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Écrit par
- Jacinto LAGEIRA : professeur en esthétique à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne, critique d'art
Classification
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