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RONDEAU GÉRARD (1953-2016)

L'importante rétrospective qui eut lieu en 2015 à l'espace culturel du Cellier, à Reims, donnait la mesure de l'œuvre de l'homme d'images qu'était Gérard Rondeau, photographe, écrivain et cinéaste.

Né le 10 avril 1953 à Châlons-sur-Marne de parents instituteurs, frère du futur écrivain et diplomate Daniel Rondeau, son aîné de cinq ans, l'enfant suit une formation secondaire au lycée Roosevelt de Reims où il obtient son baccalauréat en 1971. Interrompant ses études d’histoire à la faculté de Reims, il commence à travailler comme instituteur remplaçant, avant d'être titularisé. Son service militaire, effectué au Sri Lanka entre 1974 et 1976 au titre de la coopération, lui vaut d'être nommé lecteur à l'université de Peradeniya. Cette fonction sera suivie du poste de directeur de l'Alliance française de Kandy. La découverte du livre d'Henri Cartier-BressonÀ propos de l'URSS suffit à susciter chez lui une vocation de photographe, assumée en autodidacte. Gérard Rondeau abandonne alors ses fonctions d'administrateur pour retrouver la France qu'il parcourt avec son appareil, s'essayant à une observation impressionniste, sans préoccupation documentaire ni projet de publication, avec pour point d'attache la région de Châlons-sur-Marne. Son premier travail important, mené sur les traces des Tsiganes en France, fournira en 1982 la matière du recueil Scènes de la vie tsigane.

Nourri de l'histoire locale de sa Champagne natale à laquelle il dédiera en 2010 son livre La Grande Rivière Marne.Dérives et inventaires, Gérard Rondeau met son regard de photographe à l'épreuve de l'évocation de la Grande Guerre qui avait ensanglanté la campagne alentour. Il cerne les transformations toujours visibles d'une nature ravagée par les batailles, qu'il restitue dans leur atmosphère tragique, plus proche de la littérature que du reportage.

Réfugiés musulmans en Bosnie centrale, 1993. - crédits : Gerard Rondeau/ Agence VU

Réfugiés musulmans en Bosnie centrale, 1993.

C'est cependant par la presse que Gérard Rondeau va être reconnu comme photographe en réalisant à partir de la fin des années 1980 les portraits d'artistes que lui commande régulièrement le quotidien Le Monde et qu'il exécute à la faveur d'une rencontre, d'une conversation, voire d'une longue relation, comme celles qu'il entretient avec le romancier Yves Gibeau, le Quatuor Ysaÿe ou le peintre Paul Rebeyrolle, auquel il consacrera un livre (Rebeyrolle ou le Journal d’un peintre, 2000). Cette approche d'une société intellectuelle et artistique n'entrave pas une passion pour le voyage qui conduit Rondeau à travers l'Europe, le Proche-Orient et l'Asie. Ses photographies témoignent alors des retombées des bouleversements géopolitiques, notamment à travers l'exploration des pays Baltes, les investigations en Europe orientale, dans la Roumanie de 1989 et, durant l'hiver 1994, dans Sarajevo dévastée.

Profondément attaché aux diverses formes d'expression artistique qu'il associe à sa démarche de photographe, comme la représentation du Maroc qu'il fait dialoguer avec la peinture (Le Maroc. Hommage à Delacroix, 1999), Gérard Rondeau étend, à partir de 1990, son territoire à l'univers des musées. À la demande de la Direction des musées de France et de la Réunion des musées nationaux, il s’en fait le chroniqueur avec distance, justesse et parfois avec humour, jusqu'à fournir la matière de l'importante exposition personnelle Horscadre présentée au Grand Palais à l'hiver de 2005-2006.

Attaché au noir et blanc qui gouvernera toute sa production, curieux de techniques photochimiques qu'il s'abstient de plier à un style qui marquerait son travail, Gérard Rondeau donne bientôt une dimension plasticienne à son œuvre en altérant la réalité par diverses interventions, comme la mise en abyme par l'introduction de cadres dans le champ[...]

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Réfugiés musulmans en Bosnie centrale, 1993. - crédits : Gerard Rondeau/ Agence VU

Réfugiés musulmans en Bosnie centrale, 1993.