SCHNEIDER GÉRARD (1896-1986)
Disparu à l'âge de quatre-vingt-dix ans, Gérard Schneider est toujours resté fidèle à l'abstraction lyrique. Éminent représentant de l'école de Paris, il avait reçu, en 1975, le grand prix national des arts, et la médaille de vermeil de la Ville de Paris, en 1983.
Né en Suisse, le 24 avril 1896, Gérard Schneider passa la plus grande partie de son enfance et de son adolescence à Neuchâtel, avant d'aller faire son apprentissage de peintre à Paris, en 1916. Il se fixe définitivement dans la capitale en 1923 et travaille longtemps comme restaurateur de tableaux, avant de vivre de sa production d'artiste. À Paris, il suivit conjointement les cours de l'école des Arts décoratifs et, aux Beaux-Arts, l'enseignement du peintre académique Cormon. « J'y ai fait mes classiques », aimait dire Schneider à ceux qui s'étonnaient qu'il ait suivi une filière aussi conventionnelle. Mais, pour le peintre, le chemin de l'abstraction passait par l'intégration des formes historiques de l'art contemporain. Il bénéficia donc des apports de l'expressionnisme, du cubisme et du surréalisme. C'est vers 1939-1940 qu'il trouve une expression plus personnelle, dont témoignent ses envois au Salon des surindépendants (La Cité, 1939-1940). Et, après la Libération, il fut l'un de ceux qui abandonnèrent toute référence figurative.
Refusant, comme Soulages ou Hartung, l'abstraction géométrique qui portait encore les stigmates des utopies modernistes d'avant guerre, il réfléchit sur la formule trouvée par son ami le critique Charles Estienne dans le dictionnaire Littré : « Abstrait : sujet intérieur. » Pour Schneider, cependant, ce sujet restait imprécis : « Le peintre libère ce qui est en lui, mais qui n'a pas de nom » énonçait-il. Il s'est souvent expliqué sur sa méthode picturale, qui tentait de soumettre la spontanéité de chaque geste au contrôle de l'ensemble – méthode qui exigeait, à la fois, la proximité et la distance de la toile. Partant d'une ébauche jetée sur le support définitif, il procédait par enrichissement progressif de la surface, une zone de couleur en appelant une autre. Une série de traces colorées, balayées à la brosse d'un geste large, bâtissait ainsi le tableau final. Des comparaisons avec la musique sont fréquemment employées à propos du travail de Schneider – qui, lui-même, donna comme titre à plusieurs de ses œuvres un numéro d'opus. Selon le critique Michel Ragon, l'un de ses plus ardents défenseurs, la peinture de Schneider participe « d'une sorte de musique d'orgue, solide, stable, monumentale ». C'est peut-être dans ce même registre métaphorique qu'il faut replacer, aujourd'hui, le lyrisme de Gérard Schneider.
Bibliographie
M. Ragon, Gérard Schneider, Bodensee Verlag, Amriswil, 1961, repris in Musée de Poche, Paris
Rétrospective Gérard Schneider, Kunsthalle, Dusseldorf et palais des Beaux-Arts, Bruxelles, 1961
J.-M. Dunoyer, Schneider, éd. musée de Neuchâtel, 1983
Exposition Gérard Schneider, musée d'Art contemporain, Dunkerque, 1983.
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Écrit par
- Élisabeth LEBOVICI
: critique d'art au journal
Libération
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