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GERHARD RICHTER, PANORAMA (exposition)

Après la Tate Modern de Londres et la Nationalgalerie de Berlin, c'est au tour du Centre Georges-Pompidou à Paris (du 6 juin au 24 septembre 2012) de fêter les quatre-vingts ans de Gerhard Richter. Considéré comme le plus important peintre contemporain en activité, toutes générations confondues, l'artiste n'avait pas fait l'objet d'une grande rétrospective en France depuis 1993. Presque vingt ans après celle proposée par le musée d'Art moderne de la Ville de Paris, l'exposition Panorama, conçue par la conservatrice Camille Morineau, permet de revenir sur la trajectoire du peintre allemand entamée au début des années 1960.

Héritier d'une tradition

C'est plus précisément en 1962, après son exil en Allemagne de l'Ouest (Gerhard Richter est né en 1932 à Dresde et y résidera jusqu'en 1961) et son inscription à l'école des Beaux-Arts de Düsseldorf, que l'artiste pose les bases officielles de l'œuvre à venir, reniant par la même occasion sa production antérieure (le catalogue raisonné ne tient pas compte de sa période est-allemande). L'œuvre la plus ancienne, Tisch (Table, 1962), qui figure dans l'exposition parisienne, est représentative des débuts chancelants du peintre, de ses recherches et tergiversations. Elle témoigne aussi de l'influence exercée sur lui par le pop art américain, traduisant d'emblée une forme d'opportunisme qui permettra à Richter de s'imprégner, au long d'une phase d'apprentissage relativement courte, des principales tendances à la mode. Pour un artiste qui peu d'années auparavant était coupé de tous les pans de l'Histoire et de l'actualité de l'art contemporain – exception faite de ceux, marginaux, prévalant dans le bloc soviétique –, sa capacité d'assimilation force l'admiration. En effet, Gerhard Richter est parvenu non seulement à assimiler lesdites tendances mais aussi à les magnifier. Il est devenu en l'espace de cinq ans l'un des principaux protagonistes européens d'une pratique picturale à mi-chemin d'un hyperréalisme « impur », d'un pop art réadapté à la culture allemande et d'un art minimal dont il exploitera la portée nihiliste.

La salle inaugurale de l'exposition du Centre Georges-Pompidou regroupe un ensemble de peintures photoréalistes conçues dans la première moitié des années 1960, ce sous-genre ayant largement contribué à la notoriété de l'artiste. La technique employée est la suivante : Gerhard Richter duplique sur toile des motifs extraits de sources photographiques variées, pour la plupart médiatiques, qu'il s'évertue à « flouter » dans un second temps en passant un pinceau sec sur la peinture humide. La diversité des sources de même que le traitement identique qu'il leur impose permet en conséquence à l'artiste de souligner l'obsolescence de leur contenu, chaque motif, qu'il soit « grave » ou « léger », étant ici placé sur un pied d'égalité. Ce faisant, l'artiste se plie à une esthétique que les arts minimal et pop ont défendu à la même époque. Une esthétique où la question du contenu est neutralisée au profit d'une conception déhiérarchisée, distanciée voire aliénante.

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Écrit par

  • : maître de conférences en histoire de l'art contemporain à l'université de Valenciennes, critique d'art, commissaire d'expositions

Classification

Média

<it>Betty</it>, G. Richter - crédits : Saint Louis Art Museum

Betty, G. Richter