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TILLION GERMAINE (1907-2008)

Ethnologue et résistante, Germaine Tillion est la fille d'un magistrat mort jeune et d'une éditrice de la librairie Hachette. Elle est née le 20 mai 1907 à Allègre (Haute-Loire). Formée par deux professeurs du Collège de France, Louis Massignon, islamologue, et Marcel Mauss, anthropologue, elle enseigna de 1957 à 1980 à l'École pratique des hautes études et y dirigea le département d'ethnographie arabo-berbère. Cette intellectuelle, vouée à la justice et à la vérité, est morte le 19 avril 2008, à Saint-Mandé (Val-de-Marne).

À partir de 1934, Germaine Tillion s'immerge en Algérie parmi les pauvres des Aurès, où elle étudie la société chaouïa. Jusqu'en mai 1940, au long de quatre missions, ses échanges avec les femmes et les « Grands-Vieux » lui permettent de comprendre les structures sociales comme le poids des cousins paternels, de l'endogamie et de l'honneur. Ses capacités de médiatrice la font alors appeler tamgart (« la vieille »), « ce qui, en ce lieu-là, en ce temps-là, représentait le plus haut degré de la considération ».

Rentrée en France en juin 1940, elle est vite exaspérée « par les avanies de la défaite et les pleurnicheries de Radio-Vichy » mais constate que, dans son milieu, des noyaux de résistance se multiplient « à la vitesse des infusoires dans une eau tropicale ». Active au sein de ce qui deviendra le réseau du musée de l'Homme, trahie par un prêtre, elle est emprisonnée à Fresnes en 1942, déportée en 1943 à Ravensbrück où sa mère mourra gazée. Germaine Tillion a survécu grâce « au hasard, à la colère, à la volonté de dévoiler ces crimes, à une coalition de l'amitié ». Voulant faire surgir un peu d'humour dans l'horreur du camp, elle y avait écrit Le Verfügbar aux enfers, livret d'une opérette qui fut créée en 2007.

Déportée NachtundNebel (Nuit et Brouillard), vouée à disparaître sans laisser de traces, Germaine Tillion analysa en ethnologue, dès 1946, le système concentrationnaire. Dans Ravensbrück, elle montre ses rouages solidaires qui tendent vers « une rationalisation monstrueuse de l'esclavage – obtenir, par les coups et la terreur, le rendement maximum au prix d'un entretien vital minimum » et de l'élimination, par tous moyens, du « matériel humain usé ».

En 1954, elle souligne que la « civilisation » concentrationnaire « a été hantée par l'affreuse image de l'extermination méthodique appliquée aux Juifs dont Auschwitz restera le prototype et c'est cette image [... qui] a joué un rôle déterminant dans l'extermination des non-Juifs au cours des trois derniers mois de la guerre ». À Ravensbrück, « entreprise industrielle très prospère », annexer un camp d'invalides avait l'inconvénient de « diminuer légèrement la marge bénéficiaire [...] tel est l'argument qui a fait fléchir la balance du destin ». La longue durée de la misère concentrationnaire a moins tué que l'imagination des états-majors SS qui, à cause de l'avancée des Russes, « ont improvisé l'assassinat en masse des détenus ».

Convaincue que, pour rendre « toutes les complexités d'un événement vécu », les témoins sont nécessaires, surtout quand les textes manquent ou sont d'une « extrême sécheresse », Germaine Tillion complète son Ravensbrück pour contrer Olga Wormser-Migot, historienne spécialiste du système concentrationnaire, qui a remis en cause, en 1968, l'existence d'une chambre à gaz dans ce camp. En 1988, quinze ans après la deuxième édition, le livre est augmenté d'annexes de Pierre Serge Choumoff et d'une de ses camarades, Anise Postel-Vinay.

Associée par David Rousset, dès 1951, à la dénonciation du goulag soviétique, Germaine Tillion se préoccupe également des répressions franquistes et des violences[...]

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Écrit par

  • : docteur en études politiques et en histoire, ancien délégué-adjoint aux célébrations nationales (ministère de la Culture et de la Communication)

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