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MATTEOTTI GIACOMO (1885-1924)

Le socialiste Giacomo Matteotti, vers 1924 - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Le socialiste Giacomo Matteotti, vers 1924

Issu d'une famille de propriétaires fonciers aisés, Giacomo Matteotti fait des études de droit et milite, très jeune, au Parti socialiste italien. Interné pour pacifisme pendant la Première Guerre mondiale, il est élu député en 1919 et constamment réélu, par les circonscriptions de Ferrare et de Padoue. En 1922, lors de la scission du Parti socialiste, il ne suit pas la fraction communiste et, avec Turati, demeure au Parti socialiste, dont il devient secrétaire général en 1924. Dès l'avènement de Mussolini à la présidence du Conseil, en 1922, il dénonce à la tribune du Parlement les violences des fascistes. Le 30 mai 1924, il prononce un réquisitoire contre les malversations fascistes durant la campagne électorale et réclame l'annulation des opérations, laissant entendre qu'il apportera de nouvelles preuves à l'appui de ses accusations. Le 10 juin, il est enlevé, à Rome, par des individus qui le font monter de force dans une automobile puis, devant sa résistance désespérée, le poignardent à mort. Les assassins enterrent son corps dans un terrain vague, à la Quartarella, à 25 kilomètres de la capitale, où il il est retrouvé le 15 août. Le numéro de la voiture, relevé par un témoin, permet d'identifier les auteurs du crime. Ce sont cinq hommes de main d'un groupe fasciste, commandés par Amerigo Dumini.

La mort de Matteotti suscita une forte émotion. Mussolini nia initialement avoir eu connaissance du meurtre. La question de sa participation au « délit Matteotti » pose des problèmes qui n'ont pas été résolus, tant à l'époque des faits qu'au procès intenté, en 1947, aux assassins survivants. Il semble bien établi qu'il était au courant de l'existence et des actions de ce commando, tout comme De Bono, chef de la police, mais qu'il n'ait pas donné personnellement l'ordre d'éliminer le député socialiste.

La vague d'indignation qui traversa l'Italie à la nouvelle de la mort de Matteotti faillit briser l'ascension de Mussolini. Elle suscita une série d'actions contre le fascisme, qui se prolongea jusqu'à la fin de 1924. Isolé, démoralisé, abandonné par certains de ses partisans, le Duce songea un instant à se retirer. Il dut éliminer du gouvernement plusieurs éléments extrémistes, faire arrêter les coupables du crime et annoncer leur prochaine mise en jugement.

Mais derrière ses apparences de résolution, l'opposition se montra divisée et faible. Mussolini se ressaisit et exploita les erreurs de ses adversaires. Dès le 13 juin, en effet, une centaine de députés décidaient, tant que l'affaire Matteotti ne serait pas éclaircie, de déserter les travaux du Parlement en se « retirant sur l'Aventin ». Ils laissaient ainsi le champ libre à Mussolini et privaient leur action d'une tribune légale. Victor-Emmanuel III, arbitre de la situation, se retrancha derrière la Constitution, qui lui interdisait d'intervenir directement et refusa de prendre connaissance des documents établissant les responsabilités fascistes. Faisant alterner habilement la menace et l'apparent respect des formes juridiques, Mussolini reprit le contrôle de la situation. Avec l'aide de l'extrémiste Farinacci, secrétaire général du Parti fasciste, il se transforma en accusateur. De Bono, traduit en haute cour, fut acquitté pour insuffisance de preuves. En janvier 1926 s'ouvrit, à Chieti, le procès de Dumini et de ses complices, défendus par Farinacci. Deux des assassins furent absous ; les trois autres, condamnés à six ans de prison, furent amnistiés au bout de deux ans de détention. Au cours de la révision du procès en janvier 1947, Dumini, Proveruomo et Viala, encore en vie, furent condamnés au bagne à vie, la peine de mort ayant été abolie en Italie, sentence commuée ensuite en trente ans de réclusion.

— Paul[...]

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Le socialiste Giacomo Matteotti, vers 1924 - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Le socialiste Giacomo Matteotti, vers 1924

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  • ITALIE - Histoire

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    ...en témoigne la vague d'indignation qui traverse le pays, en juin, après l'assassinat, par les squadristes (membres de la squadra) du leader socialiste Giacomo Matteotti. Mais l'opposition, divisée, au lieu d'exploiter cette circonstance, demeure inerte et commet l'erreur d'abandonner la lutte parlementaire...