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MENOTTI GIAN CARLO (1911-2007)

Gian Carlo Menotti est-il un « cas » dans l'histoire de l'art lyrique du xxe siècle ? Pierre Boulez a dit de lui qu'il était « le Puccini du pauvre » ; il a rétorqué en taxant le Français de « Webern du parvenu » ! Inutile querelle. S'il est une qualité qu'il faut reconnaître au compositeur, c'est d'être resté fidèle à ses principes, et à une vision lyrique qui n'est pas toujours exempte de sentimentalité mais qui se révèle efficace sans jamais recourir à une facilité accrocheuse. Certes, tout en étant à l'écoute des échos de son temps, il n'a jamais cédé à l'atonalisme ou au sérialisme – ce que n'ont jamais fait non plus Samuel Barber ou Francis Poulenc, auxquels on ne l'a jamais reproché ; pas plus que l'on n'a reproché à Benjamin Britten son originalité et sa diversité. Jamais Menotti ne rejeta sa filiation avec Puccini, évidente. On peut aussi le rapprocher, pour ses couleurs orchestrales et son élégance, du trop méconnu Ermanno Wolf-Ferrari (1876-1948). Et, dans ses cantates, ses mélodies ou ses pages orchestrales, son lyrisme atteint une pureté dont on ne peut nier l'émotion.

Un musicien précoce

De Gian Carlo Menotti, américain d'origine italienne – il gardera d'ailleurs toujours sa citoyenneté italienne –, peut-on dire qu'il est un enfant prodige ? Il naît à Cadegliano, en Lombardie, le 7 juillet 1911, sixième des dix enfants d'une famille aisée. Lorsqu'il entre au Conservatoire Giuseppe-Verdi de Milan à l'âge de douze ans, il a déjà à son actif deux opéras ! Sa vocation musicale ne fait aucun doute et, à dix-sept ans, sur les conseils d'Arturo Toscanini, il part étudier au prestigieux Curtis Institute of Music de Philadelphie, où il reçoit l'enseignement de Rosario Scalero. C'est là qu'il rencontre un autre étudiant, Samuel Barber (1910-1981), musicien lui aussi, qui deviendra son compagnon, et l'un des compositeurs les plus en vue des États-Unis ; Menotti écrira pour lui le livret de l'opéra Vanessa, créé au Metropolitan Opera de New York le 15 janvier 1958 et repris la même année au festival de Salzbourg.

En 1935, son diplôme du Curtis en poche depuis 1933, Menotti réussit à faire jouer à l'Institut son premier ouvrage lyrique, un opéra-bouffe dont il a lui-même élaboré le livret, Amelia al ballo (« Amelia va au bal »), donné dans une traduction anglaise – Amelia Goes to the Ball – de George Mead. Peu après, une reprise a lieu à New York, et le Metropolitan Opera décide d'afficher cette délicieuse bluette la saison suivante. Efficacité théâtrale, aisance mélodique, sens du théâtre : les qualités qui feront la réputation de Menotti sont évidentes. La N.B.C., chaîne de radio très écoutée, s'intéresse au jeune artiste, au point de lui commander une pièce ; ce sera, en 1939, The Old Maid and The Thief (« La Vieille Fille et le voleur »), un autre opéra-bouffe. Au Metropolitan, en revanche, en 1942, The Island God échoue : la veine comique a été momentanément délaissée au profit d'une réflexion plus philosophique, voire religieuse, qui ne convainc pas le public.

L'immédiat après-guerre va couronner les efforts de Menotti. L'université Columbia, qui en est commanditaire, affiche, le 8 mai 1946, dans son Brander Matthews Theater, The Medium (« Le Médium »), opéra de chambre, tragédie en deux actes pour cinq chanteurs, un mime, et une formation de quatorze instruments. Cette histoire d'une voyante prise au piège de ses propres supercheries a un tel impact sur les spectateurs qu'elle est bientôt récupérée par le Ethel Barrymore Theatre de Broadway ; pour ouvrir la soirée, le compositeur imagine une comédie en un acte légère et charmante, The Telephone, or l'Amour à trois, encore[...]

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Média

Gian Carlo Menotti - crédits : Erich Auerbach/ Hulton Archive/ Getty Images

Gian Carlo Menotti