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VOLONTE GIAN MARIA (1933-1994)

Le cinéma italien des années 1960 et 1970 avait le cœur assez large pour qu'y cohabitent le génie visionnaire de Fellini, l'élégance inquiète d'Antonioni, les derniers flamboiements de Visconti et un cinéma civique qui se voulait responsable et engagé. Des films de Francesco Rosi, d'Elio Petri, des frères Taviani, de Giuliano Montaldo. Des films qui avaient comme dénominateur commun cet acteur mince, au regard droit, aux mains éloquentes, Gian Maria Volonté.

En France, on a appris à le connaître au temps des ciné-clubs militants, dans deux films qui n'avaient pas eu d'exploitation commerciale : en 1963, Un homme à brûler (le premier film de long métrage des frères Taviani, alors associés à Valentino Orsini), qui disait la geste de Salvatore Carnevale, un syndicaliste sicilien assassiné par la mafia. Puis, en 1964, Le Terroriste (première œuvre, là encore, de Gianfranco De Bosio, plus connu comme metteur en scène de théâtre), qui évoquait, en termes de politique et de morale plus que d'action, l'organisation de la Résistance dans une Venise hivernale.

Né à Milan, Gian Maria Volonté avait fait du théâtre, du côté de chez Brecht. On l'avait vu à la télévision, il avait eu de petits rôles au cinéma (le premier dans Sous dix drapeaux, un film de guerre anodin de Duilio Coletti en 1960), on l'avait même vu en jupette dans des péplums d'Edgar Ulmer ou de Cottafavi. Ni Un homme à brûler ni Le Terroriste n'ont fait de lui une vedette. C'est paradoxalement dans les premiers westerns transalpins de Sergio Leone, Pour une poignée de dollars (1964) et Et pour quelques dollars de plus (1965), que Gian Maria Volonté, bronzé, barbu, bardé de cartouchières, est devenu populaire dans son propre pays... En 1967, il rencontre Elio Petri qui le dirige dans À chacun son dû, adapté d'un roman de Leonardio Sciascia.

C'est le temps où le cinéma italien s'engage et se montre plus immédiatement politique que le cinéma français. Un cinéma grand public, qui questionne le présent et le passé proche. Volonté, depuis longtemps militant du P.C.I., se rapproche des mouvances gauchistes avant les années de plomb (en 1972, on le verra porter l'uniforme de l'U.S. Cavalry dans Vent d'Est, un western idéologique de Jean-Luc Godard et Jean-Pierre Gorin, diffusé par le Collectif Dziga-Vertov, où figuraient aussi Daniel Cohn-Bendit et Glauber Rocha). Il tourne alors dans les films d'Elio Petri (Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon, 1970, La classe ouvrière va au paradis, 1971, Todo Modo, 1976, d'après Leonardo Sciascia), de Giuliano Montaldo (Sacco et Vanzetti, 1971), des Taviani de nouveau (Sous le signe du Scorpion, 1969), et même en France dans L'Attentat d'Yves Boisset (1972), où il compose un leader du Tiers Monde inspiré de Mehdi ben Barka. C'est surtout Francesco Rosi qui lui donne ses plus grands rôles, des Hommes contre (1970) à Chronique d'une mort annoncée (1986), en passant par L'Affaire Mattei (1972), Lucky Luciano (1973) ou encore Le Christ s'est arrêté à Eboli (1979).

Gian Maria Volonté est mort le 6 décembre, à Florina, à la frontière gréco-macédonienne. Dans Le Regard d'Ulysse, que réalisait Théo Angelopoulos, il interprétait le rôle du conservateur de la cinémathèque de Sarajevo, où un Ulysse moderne tentait de retrouver trois bobines d'un film perdu. Volonté avait tourné des scènes du film dans les ruines de Mostar, en Bosnie... Le cinéma comme ultime mémoire du monde, de notre monde.

— Jean-Pierre JEANCOLAS

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Écrit par

  • : professeur d'histoire, historien de cinéma, président de l'Association française de recherche sur l'histoire du cinéma

Classification

Autres références

  • PETRI ELIO (1929-1982)

    • Écrit par
    • 704 mots
    • 1 média

    Tardivement consacré en France par le grand prix spécial du jury et le grand prix spécial de la critique internationale, décernés, au festival de Cannes de 1970, à Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon, Elio Petri devait être considéré depuis lors comme un cinéaste politique, dans...