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SILOE GIL DE (actif entre 1486 et 1505)

Une des figures les plus attachantes du gothique tardif. Bien qu'étranger à l'Espagne par sa naissance, le sculpteur d'origine nordique Gil de Siloe sut exprimer avec maîtrise et poésie une orientation essentielle de l'art de ce pays : le goût pour l'exubérance décorative. Comme il est parfois désigné sous le nom de Gil d'Anvers, on peut supposer qu'il était d'origine flamande, ce qui s'accorde bien avec d'autres caractères de son style. Il exerça principalement son activité à Burgos où il est mentionné entre 1486 et 1501.

C'est en 1486 que la reine Isabelle la Catholique lui commanda le tombeau qui devait recevoir les cendres de son père, le roi Jean II de Castille, et de sa mère, Isabelle de Portugal, dans la chartreuse de Miraflores à Burgos. Placé devant l'autel de la chapelle, le monument dessine une étoile à huit pointes, c'est-à-dire un motif d'origine musulmane, mais dont la source immédiate paraît avoir été la voûte de la chapelle du Connétable, dans la cathédrale de Burgos. En dépit de ses vastes dimensions, cette œuvre d'albâtre est traitée comme un joyau. Les gisants du roi et de la reine sont entourés d'une foule de figurines — personnages de l'Ancien Testament, images de la Vierge Marie et représentations des Vertus — distribuées dans un univers de baldaquins, de pinacles et d'autres éléments architecturaux, qui décomposent les surfaces en d'innombrables facettes et produisent dans la lueur de l'albâtre un effet quasi magique.

En même temps qu'il travaillait à cette œuvre majeure, Gil de Siloe exécuta, entre 1489 et 1493, le tombeau du frère d'Isabelle la Catholique, l'infant don Alfonso. Mort prématurément, victime du poison ou de la peste, le jeune homme repose dans un enfeu ménagé à gauche du tombeau de ses parents. Il est représenté agenouillé, les mains jointes, devant un prie-Dieu. Comme le roi et la reine, il est somptueusement vêtu. La beauté du monument résulte en partie de la richesse inouïe du décor, c'est-à-dire d'une manière toute musulmane et mudéjare de traiter la surface du matériau.

Le sculpteur fit preuve de la même virtuosité dans le retable du maître-autel de Miraflores (1496-1499), qui vit l'achèvement de son travail à la chartreuse. Le symbolisme des formes, qui avait déjà présidé au dessin de la tombe royale, organise ici encore la surabondance des motifs iconographiques. Il donna naissance à tout un jeu de cercles autour d'un grand crucifix central. Pour cette œuvre, Gil de Siloe eut comme collaborateur le peintre flamand Diego de la Cruz.

Le chef-d'œuvre du sculpteur est un tombeau réalisé entre 1500 et 1505 pour Juan de Padilla, le page favori d'Isabelle la Catholique, mort au cours de la guerre de Grenade à l'âge de vingt ans, en 1491. Il se trouvait dans le beau monastère, aujourd'hui ruiné, de Fresdelval et a été transporté au musée de Burgos.

On peut également suivre une partie de l'activité de l'artiste dans la cathédrale de Burgos. C'est là que Gil de Siloe réalisa, déjà aidé de Diego de la Cruz, son œuvre la plus archaïque, le Retable de l'Arbre de Jessé dans la chapelle Sainte-Anne (env. 1486-1488). On y observe encore une raideur et un manque d'aisance dont il ne tarda pas à se défaire. On lui confia, tout à la fin de sa carrière, le Retable de Sainte-Anne de la chapelle du Connétable (env. 1500-1505), qu'il laissa inachevé. On doit attribuer à l'un de ses collaborateurs le tombeau de l'évêque Alfonso de Cartagena, dans la chapelle de la Visitation. Ce prélat mourut en 1447, mais le sarcophage n'aurait été réalisé que sensiblement plus tard.

— Marcel DURLIAT

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Écrit par

  • : professeur émérite d'histoire de l'art à l'université de Toulouse-Le-Mirail

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  • BURGOS

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