CHESTERTON GILBERT KEITH (1874-1936)
Journaliste, essayiste, critique littéraire et critique d'art, poète, romancier, auteur dramatique, G. K. Chesterton a pratiqué tous les genres avec un bonheur presque égal. En outre, dessinateur au trait souvent caricatural, il illustre ses œuvres et celles de ses amis. L'écrivain excelle à traduire les visions colorées de l'artiste, il communique aux notions les plus abstraites une vie intense et il parvient ainsi à capter l'attention du lecteur qu'il retient par un feu roulant de paradoxes : méthode de choc, arme précieuse et efficace entre les mains d'un auteur aux fortes convictions qui entend exprimer avec une égale vigueur ses haines et ses admirations. Haine de ce qui est flou et imprécis, dans la pensée surtout mais aussi en art, d'où ses attaques virulentes contre l'impressionnisme dans une de ses premières œuvres, Heretics (1905), où il dénonce également le caractère morbide de la littérature fin de siècle et le danger des utopies socialistes de H. G. Wells, tournées vers l'avenir, donc vagues. Il ne se sent pleinement heureux que dans un univers à trois dimensions où le relief et les ombres portées témoignent du volume et de la consistance de ce qui existe. Ce thomiste convaincu a écrit, en 1933, un ouvrage plein de verve et de truculence sur saint Thomas d'Aquin. Chesterton ne cesse de chanter sa reconnaissance au Créateur, plus particulièrement peut-être dans des ouvrages comme Orthodoxy (1908), Supervivant (Manalive, 1912), Saint Francis of Assisi (1923), L'Homme éternel (Everlasting Man, 1925). Converti au catholicisme, il en est considéré comme l'un des meilleurs défenseurs.
Sa nature militante trouve son plein épanouissement dans des controverses orales et écrites avec d'autres jouteurs de talent comme G. B. Shaw ou H. G. Wells. Quelques journaux (The New Witness, G. K.'s Weekly) lui servent de tribune pour exprimer ses vues, et celles de son frère Cecil, sur des problèmes sociaux et politiques qu'il souhaite résoudre par un retour à une vie agraire et à certaines institutions médiévales comme les guildes. Dans ce dessein, il crée avec quelques amis le mouvement distributiste, dont il expose le programme dans Ce qui cloche dans le monde (What's Wrong With the World, 1910), William Cobbett (1925), et dans The Outline of Sanity (1926).
Toutefois, ses activités politiques et sociales ne sauraient en faire oublier d'autres, plus importantes pour sa réputation littéraire. Ce fut, en effet, un critique fin et pénétrant : Robert Browning (1903), Charles Dickens (1906), La Littérature de l'époque victorienne (The Victorian Age in Literature, 1913). Il fut aussi un voyageur à l'esprit alerte, prompt à découvrir la vérité cachée sous les apparences : La Nouvelle Jérusalem (The New Jerusalem, 1920), Lumière sur deux villes (Sidelight on New London and Newer York, 1932). Il fut encore le poète de La Ballade du cheval blanc (The Ballad of the White Horse, 1911), que beaucoup considèrent comme son chef-d'œuvre. Il fut enfin un romancier capable d'imaginer un univers fantastique où la banale réalité quotidienne est transfigurée et où les héros refusent de se laisser gagner par l'engourdissement de l'habitude : The Napoleon of Notting Hill (1904), Un nommé Jeudi (The Man Who Was Thursday, 1908). Parmi ses personnages, le père Brown, prêtre détective, exprime souvent, avec simplicité et profondeur, les positions métaphysiques de Chesterton. Son autobiographie, datée de 1936, est un document passionnant sur l'homme et son époque.
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Écrit par
- Christiane d' HAUSSY : agrégée de l'Université, chargée d'une maîtrise de conférence à l'université de Paris-XII
Classification
Média
Autres références
-
POLICIER ROMAN
- Écrit par Claude MESPLÈDE et Jean TULARD
- 16 394 mots
- 14 médias
...d'un cycle de dix volumes. Plus haut encore, c'est le père Brown, « détective du bon Dieu », imaginé en 1910 par le romancier et philosophe londonien Gilbert Keith Chesterton (1874-1936) et héros de cinquante et une nouvelles rassemblées dans cinq recueils dont La Clairvoyance du père Brown (The Innocence...