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BENELLI GIOVANNI (1921-1982)

Deux fois, en 1978, le cardinal Benelli aurait pu être pape. Il avait juste un an de moins que Jean-Paul II. Tandis que le pape polonais se remettait d'un grave attentat, une crise cardiaque a emporté celui dont, lors de deux conclaves, on parlait davantage parce qu'il était plus connu de la presse. S'il avait été élu, on serait ainsi revenu à la solution qui a prévalu, au prix d'un troisième conclave en quatre ans. L'Église romaine y aurait gagné quatre années d'administration rigoureuse aux dépens d'une présence charismatique.

Giovanni Benelli était né le 12 mai 1921 près de Pistoie, en Toscane. Carrière classique d'un sujet brillant, comme on en connaît tant en Italie. Distingué par son curé, il entre au séminaire diocésain, y fait ses études secondaires et ecclésiastiques, achève celles-ci au Séminaire français de Rome (c'est déjà moins banal), est ordonné prêtre avec dispense d'âge (c'est courant) en octobre 1943, obtient à l'Université grégorienne, tenue par les jésuites, sa licence de théologie et son doctorat en droit canonique, fréquente l'Académie diplomatique pontificale et entre en 1947 à la Secrétairerie d'État, dont Pie XII s'est réservé la direction. Cette fois, c'est un des deux responsables de cet organisme, Mgr Montini — le futur Paul VI —, qui l'a distingué et le prend comme secrétaire. Il ne peut rêver meilleure école de formation, ni meilleur centre d'information.

Bientôt, ce sera le service à l'étranger, dont il gravit les échelons successifs : secrétaire de nonciature à Dublin en 1950, puis à Paris en 1953, où il assiste au règlement de l'affaire des prêtres-ouvriers ; auditeur à Rio de Janeiro en 1960 ; conseiller à Madrid en 1962, où il contribue à distendre les liens entre l'Église et le régime ; il revient à Paris en 1965, comme observateur permanent du Saint-Siège à l'U.N.E.S.C.O., où son intérêt va aux problèmes de l'alphabétisation. L'année suivante, il est nommé archevêque titulaire, pro-nonce au Sénégal et délégué apostolique pour l'Afrique occidentale : on l'y crédite d'une grande activité, qui fut surtout brève. Moins d'un an plus tard, Paul VI le rappelle à Rome et lui confie le poste que lui-même occupait en 1947, celui de substitut de la Secrétairerie d'État.

En fait, la situation était bien différente. Tandis que Montini avait travaillé sous l'autorité immédiate d'un pape qui veillait à tout, Benelli, pendant deux ans encore, jusqu'à l'arrivée du cardinal Villot, allait se trouver avec un secrétaire d'État octogénaire et valétudinaire, le cardinal Amleto Cicognani. En outre, Paul VI lui confiait une tâche lourde et délicate : mettre la dernière main au projet de réforme de la Curie romaine, conçu sans lui ; et, deux mois après la publication en août 1967, mettre en œuvre cette réforme.

La précédente réforme du gouvernement de l'Église remontait à Pie X et datait de 1908. Par rapport au passé, c'était une sérieuse modernisation. En 1908, la primauté restait à la Suprême Congrégation du Saint-Office, héritière de la vieille Inquisition. La Secrétairerie d'État venait loin derrière, parmi les Offices, après congrégations et tribunaux ; en 1967, au contraire, elle passe au premier rang, avec la mission d'« aider de près (da vicino) le Souverain Pontife soit dans la charge de l'Église universelle, soit dans ses rapports avec les organes de la Curie romaine ». Sa structure interne est elle-même modifiée à l'avantage du substitut : ses trois sections sont réduites à une, dont il est le chef, tandis que sa compétence s'étend sans limite. En quinze ans, ses effectifs feront plus que doubler. Quant à Benelli, il est présent à tous les points stratégiques en tant que membre[...]

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Écrit par

  • : directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales

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