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PREVITALI GIOVANNI (1934-1988)

De mai 1959 à janvier 1960, les lecteurs de la revue Paragone-Arte, publiée à Florence depuis 1950 sous la direction de Roberto Longhi, eurent la surprise de voir paraître quatre essais d'une acuité critique rare, consacrés à la redécouverte par le xviiie siècle de l'art médiéval italien et à la formation des premières collections européennes de « primitifs ». L'auteur de ces essais était Giovanni Previtali, un Florentin alors âgé de vingt-cinq ans.

Previtali avait fait des études d'histoire de l'art avec Roberto Longhi et s'était particulièrement consacré à l'histoire de la critique d'art avant la fin de ses études. Dès ses débuts, il s'intéressa à la méthodologie, ce qui le porta à conjuguer la connaissance spécifique de l'œuvre d'art avec une conception de la critique que lui-même résumait ainsi : « Là où n'existe pas un rapport précis, ponctuel, entre une œuvre d'art et un jugement critique la concernant, il n'y a pas critique d'art. » Axés sur une connaissance rare de l'historiographie des xviie et xviiie siècles et sur une familiarité également remarquable avec les œuvres d'art sur lesquelles elle porte, les articles de 1959 reflétaient ces principes. Tout en réalisant, dès les années qui suivirent, la recension des principaux textes relatifs aux nouvelles hypothèses de critique et d'historiographie (Read et Hauser, Schapiro, Panofsky et Gombrich, Francastel, Meiss, Arnheim, etc., dont les analyses souvent polémiques permirent à Previtali d'élargir les bases de ses recherches), il élabora et publia en 1964 La Fortuna dei primitivi. Dal Vasari ai neoclassici (La Fortune des primitifs, traduit en français en 1994). Ce livre contribua à une meilleure connaissance de la critique de l'art médiéval en faisant redécouvrir la spécificité des langages et des valeurs formelles énoncée par le siècle des Lumières ainsi que la relativité du jugement historique, à l'opposé de l'interprétation romantique qui privilégie le contenu spirituel. Mais surtout ce livre marqua profondément l'histoire même de la critique d'art.

D'une approche de l'art des « primitifs », à travers la critique, Previtali à partir de 1961 s'orienta vers l'étude directe des primitifs italiens, qui culmine avec la monographie de 1967, Giotto e la sua bottega. En même temps, Previtali poursuivit une enquête sur la sculpture du xive siècle, aboutissant d'une part à un grand nombre d'essais sur les sculptures ombriennes en bois, d'autre part à une reconstitution brillante et convaincante de la personnalité de Marco Romano, sauvée de la confusion avec Gano da Siena et replacée au rang de principale alternative siennoise à Giovanni Pisano. Il est assez significatif que la publication essentielle dans cette veine, la monographie sur Giotto, inclue dans son titre le mot «  atelier » : Previtali se rangeait ainsi aux côtés de ceux, peu nombreux par la suite, pour qui les maîtres des siècles passés n'étaient pas des démiurges et ne travaillaient pas en démiurges, mais représentaient l'épicentre d'un système collectif, « l'atelier » ; celui-ci, outre qu'il constituait un bouillon de culture pour de nouveaux maîtres, fut souvent susceptible de fournir des solutions novatrices — précisément parce que « d'atelier ».

Dans les années suivantes, devenu titulaire de la chaire universitaire d'histoire de la critique d'art, puis d'histoire de l'art médiéval et moderne, Previtali était passé de Florence à Messine, puis à Sienne et à Naples ; il s'intéressa à l'art de la Sicile et de l'Italie du vice-royaume pendant la Renaissance : d'Antonello de Messine et son cercle à la peinture du xvie siècle à Naples et dans le vice-royaume[...]

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Écrit par

  • : professeur d'histoire de l'art médiéval et contemporain à la faculté de lettres et philosophie de l'université Tor Vergata, Rome.

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