FRACASTORO GIROLAMO (1478-1553)
Médecin, humaniste et poète véronais, Fracastoro est l'une des figures les plus représentatives du gentilhomme savant de la Renaissance.
Après des études à l'université de Padoue, où il a pour condisciple Copernic et comme maîtres l'anatomiste Achillini et le philosophe Pomponazzi, il y enseigne à son tour la logique. Il séjourne pendant plusieurs années auprès du général vénitien Alviano, et parfait son expérience médicale en le suivant dans ses campagnes militaires. Il partage le reste de son existence entre Vérone et sa villa d'Incassi, se consacrant à l'étude des sciences mathématiques et naturelles, à la poésie et à la médecine. Très sollicité pour sa compétence médicale, il est nommé par Paul III médecin du concile de Trente.
Fracastoro est surtout connu pour son poème sur la syphilis : Syphilidis, sive morbi gallici, libri tres, écrit en 1521 et publié en 1530, qui contient des descriptions réalistes et cliniques de la maladie, et les principes scientifiques de sa thèse sur la contagion. Pour Fracastoro, la syphilis (ou mal français) est antérieure au retour de Colomb. Il l'attribue, comme nombre de ses contemporains, à la corruption de l'air par la décomposition des matières organiques à l'occasion des guerres avec les Français, et prescrit des frictions au mercure et au bois de gaïac. Ce premier ouvrage, immédiatement célèbre et traduit dans de nombreux pays, est suivi en 1534 par De vini temperatura, où l'auteur étudie les propriétés des vins selon les quatre humeurs : le chaud et le froid, le sec et l'humide. En 1538, il publie Homocentricorum sive de stellis liber unus, dans lequel il explique le système planétaire par des mouvements homocentriques, et De causis criticorum dierum libellus, concernant les périodes critiques dans les maladies. Puis il regagne Vérone et, tout en soignant les malades, il compose la suite de son œuvre.
Il développe ses idées sur la contagion, notamment dans son traité De contagionibus et contagiosis morbis et eorum curatione, libri tres (1546), qui peut être considéré comme le premier ouvrage entièrement consacré à l'épidémiologie. Rejetant l'enseignement de la médecine dogmatique et niant toute influence des astres sur l'origine et le développement des maladies, il met en lumière, pour la première fois, le caractère contagieux des maladies infectieuses (typhus, tuberculose, gale, syphilis), ainsi que les agents de leur transmission (seminaria contigionis) au sujet desquels il précise : « Ces germes ont la faculté de se multiplier et de se propager. » Il distingue trois formes de contagion : par simple contact, par objets contaminés ((il indique pour la première fois la transmission de la phtisie par les vêtements des tuberculeux), à distance (par les nuées, les insectes). Il distingue aussi les maladies des plantes transmissibles aux animaux, les maladies communes à l'homme et à l'animal, etc. Il eut donc le pressentiment de méthodes nouvelles de recherche scientifique fondées sur l'observation et l'expérience, et il est à bon droit considéré comme un des précurseurs de la pathologie moderne.
Il est aussi l'auteur de poésies latines d'une exquise élégance virgilienne, qui se chargent d'une sincère émotion dans les pages familières. Par ailleurs, son poème biblique Ioseph, inachevé, s'insère déjà dans le courant idéologique de la Contre-Réforme. Enfin, son dialogue Naugerius sive de poetica apporte une contribution discordante aux études sur la Poétique d'Aristote. Se rapprochant des positions platoniciennes, Fracastoro a une conception exclusivement esthétique et autonome de la poésie (beauté idéale des choses) et du poète (créateur de beauté universelle).
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Écrit par
- Jacqueline BROSSOLLET : archiviste documentaliste à l'Institut Pasteur, Paris
- Adelin Charles FIORATO : professeur à l'université de Paris-Sorbonne
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